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  #1  
ÞÏíã 17 Sep 2013, 06:46 AM
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ÇÝÊÑÇÖí Ibn Taïmiya, un sophiste ?




Ibn Taïmiya, un sophiste ?

(Partie 1)

L’Imam Dhahabi fait une révélation qui, si elle avait été imputée à Sheikh el Albani, on n’imagine les « foudres » qui lui seraient tombées dessus. Ce dernier parle du principe de précaution dans les questions du takfîr, avant de conclure : « L’auteur a dit : c’est exactement ma confession.

Peu avant de mourir, Sheïkh el Islâm ibn Taïmiya révéla : « Je ne kuffar aucun adepte de la communauté. » Il s’inspirait de la parole du Prophète (r) : « Seul un croyant garde consciencieusement ses ablutions. » Il en conclut que faisant sa prière avec les ablutions, on est musulman. »

[Siar a’lâm e-nubalâ (15/88).]

Louange à Allah le Seigneur de l’Univers ! Que les Prières et le Salut d’Allah soient sur notre Prophète Mohammed, ainsi que sur ses proches et tous ses Compagnons !

Introduction

Sheïkh el Islam établit la règle selon laquelle une parole de kufr ne voue pas forcément à la mécréance tous ceux qui la prononcent. Se prononcer sur un cas particulier, cela revient à se prononcer sur son sort dans l’au-delà en appliquant sur lui les textes de la menace divine… Or, si ce dernier, au même moment, n’est ni un mécréant ni un hypocrite, il ne peut être qu’un croyant.[1]

À l’unanimité des savants, l’apostat est plus condamnable que le mécréant d’origine. [2] La sunna établit que la punition de l’apostat est plus sévère que celle du mécréant d’origine, comme le démontrent notamment les points suivants :

L’apostat est mis à mort sans condition ; il ne lui est pas offert de verser un tribut et de devenir un dhimmî, contrairement au mécréant d’origine.
L’apostat est mis à mort, même s’il est incapable de prendre les armes, contrairement au mécréant d’origine qui ne participe pas au combat, selon la plupart des savants à l’instar d’Abû Hanîfa, Mâlik, et Ahmed. En revanche, pour la majorité des savants, l’apostat est passible de la peine de mort. Cette tendance est celle de Mâlik, Shâfi’î, et Ahmed.
L’apostat est privé de certains droits (mariage, héritage), et on n’a pas le droit de manger sa viande, contrairement au mécréant d’origine, etc.[3]

Ibn Taïmiya distingue entre le statut d’un acte dans l’absolu et son application à un cas particulier

Sheïkh el Islam ibn Taïmiya établit que les Textes divins concernant le mauvais devenir de l’homme (wa’îd) et les paroles provenant des grandes références de la religion sur les questions du takfîr (taxer quelqu’un d’apostat), du tafsîq (taxer quelqu’un de pervers), et autres, n’impliquent pas qu’ils faillent les appliquer à une personne en particulier sauf si celle-ci répond aux conditions pour le faire et si toute restriction en est exclue.[4]

Puis, il enchaine : « Il n’y a pas de différence en cela entre les questions fondamentales et les questions subsidiaires de la religion, pour ce qui est du châtiment divin dans l’au-delà. Cette règle englobe tout individu passible de la menace divine (châtiment, malédiction, courroux) qu’elle soit perpétuelle ou non, ou portant des noms (ism) qui s’y rattachent comme mécréant (pour le takfîr) et pervers (pour le tafsîq). Nous pouvons faire entrer dans cette règle indistinctement les innovations (qu’elles soient dogmatiques ou rituelles) qui touchent à la religion, ou les actes de débauche qui touchent à la vie profane, et auxquels on donne le nom de perversité corporelle.

Quant aux différents statuts terrestres, nous pouvons dire la même chose. Autrement dit, le djihad lancé contre les mécréants doit être précédé de la prédication. Le châtiment s’applique uniquement, en effet, à celui qui a reçu la preuve céleste. Nous pouvons dire la même chose pour les punitions des pervers, soit qu’elle n’a pas lieu avant d’avoir établi contre eux la preuve céleste. »[5]

Pour les questions claires de la religion, le Coran suffit en lui-même pour établir la preuve céleste

Ibn Taïmiya explique : « Les bases fondamentales de la religion se présentent de la façon suivante : soit, il s’agit de questions auxquelles il incombe de donner foi, de prononcer verbalement, ou de mettre en pratique. Ex. : les questions qui touchent à l’Unicité, aux Attributs, au destin, à la prophétie, à l’eschatologie (la vie après la mort ndt.), ou toutes les questions qui les démontrent…

Toutes les questions que l’individu à besoin de connaitre et de croire d’une foi ferme ont été pleinement clarifiées par Allah et Son Messager, de sorte qu’elles ne lui offrent aucune excuse. Elles incarnent les plus grands enseignements que le Messager a clairement transmis, et expliqués aux hommes. Elles incarnent également les plus grands enseignements avec lesquels Allah a établi la preuve céleste contre Ses créatures, par l’intermédiaire des messagers qui menèrent leur mission à bien. D’une part, le Livre d’Allah qui fut fidèlement véhiculé tout d’abord par les Compagnons, puis par leurs successeurs directs, en ayant pris soin de garder intacts les termes et la compréhension que le Messager leur a transmis ; et d’autre par la Sagesse qui incarne la Tradition prophétique qui nous fut également véhiculée par ces derniers ; tous deux répondent à ce besoin d’éclaircissement de la façon la plus parfaite… »[6]

Or, ce discours est relatif ; il varie en fonction des endroits, des époques et des personnes

Ibn Taïmiya explique : « Une fois que le Coran fut entièrement révélé et que la religion fut parachevée, il est possible qu’un individu n’en reçoive qu’une partie. Dans ce cas, il incombe de croire en gros, à tous les enseignements du Messager, et en détail, à ceux qu’il connait en particulier. Quant à ceux qu’il n’a pas reçus et qu’il n’est pas dans la possibilité de connaitre, il doit y donner foi en détail s’ils venaient à lui parvenir. Un homme peur croire au Messager d’une foi ferme et venir à mourir avant l’entrée de la prière ou l’obligation d’accomplir tel ou tel acte. Dans ce cas, il est mort en ayant une foi parfaite par rapport à ce qui lui était demandé. Quand vient l’heure de la prière, on est obligé de la faire. On est ainsi soumis à un nouveau commandement auquel on n’était pas tenu auparavant… Ainsi, la foi qui incombe à la personne responsable varie d’une part en fonction des nouvelles révélations venant du ciel, et, d’autre part, en fonction de ce qui lui en parvient. »[7]

Ailleurs, il souligne en parlant de la distinction entre les usûl et les furû’ (questions subsidiaires de la religion) : « … la notion de « formel » ou de « probabilité » est relative. Une question peut être formelle pour quelqu’un qui détient de son point de vue une preuve irréfutable ; il peut avoir entendu un texte prophétique et pénétrer parfaitement ses intentions ; au moment où pour un autre cette question n’atteint même pas le degré de probabilité, avant qu’on puisse parler de formelle, étant donné qu’il n’a jamais eu cette preuve entre les mains, ou que, bien qu’il l’en ait connaissance, il remet en question son sens ou son authenticité, ou encore qu’il ne soit pas en mesure d’y puiser le moindre argument. »[8]

Renier un point élémentaire de la religion est en principe inexcusable

ibn Taïmiya établit dans un passage : « Quiconque renie l’aspect obligatoire de certaines obligations notoires (ou pratiques) communément transmises (mutawâtir), comme les cinq prières, le jeûne du ramadhan, le pèlerinage à la Maison Sacrée ; ou l’interdiction de commettre certains péchés notoires et communément transmis, comme la perversité, l’injustice, le vin, les jeux de hasard, l’adultère, etc. ; ou qui conteste certaines choses licites dont la légitimité est notoire et communément transmise comme le pain, la viande, le mariage ; c’est un mécréant apostat qui doit être mis à mort s’il refuse de se repentir. »[9]

Même dans ce domaine, la chose est relative : celle-ci varie en fonction des endroits, des époques et des personnes

Pour preuve, il soutient dans un autre passage : « On ne peut taxer d’apostat (kaffar) un cas particulier avant l’iqâma el hujja, comme celui qui renie l’aspect obligatoire de la prière, de la zakât, et qui autorise moralement le vin, l’adultère en faisant une erreur d’interprétation (ta-awwal)… comme l’ont fait les Compagnons avec ceux qui s’étaient autorisés le vin. »[10]

Ailleurs, il est plus explicite : « Le fait qu’une question soit connue de façon élémentaire par tous les musulmans est, somme toute, relatif. Le nouveau converti et le Bédouin vivant loin des villes peuvent n’en avoir aucune connaissance, avant de pouvoir parler de connaissance élémentaire. Bon nombre de savants savent de façon élémentaire que le Prophète (r) a fait la prosternation de l’oubli, qu’il a jugé que le prix de sang devait être versé par le clan du meurtrier, qu’il a jugé que l’enfant naturel était affilié au lit, etc. Certes, les spécialistes connaissent ces points de façon élémentaires, mais, au même moment, la plupart des gens n’en ont jamais entendu parler. »[11]

« C’est pourquoi, si un homme qui se convertit ne sait pas que la prière est obligatoire, ou que le vin est interdit, il ne devient pas mécréant en croyant le contraire, et, mieux, il ne mérite aucun châtiment, pas avant que la preuve prophétique ne lui soit parvenue. »[12]

À suivre…




[1] Minhâj e-sunna d’ibn Taïmiya (3/60).

[2] Majmû’ el fatâwâ (28/477, 478).

[3] Majmû‛ el Fatâwâ (28/534-535).

[4] Majmû’ el fatâwâ (10/372).

[5] Majmû’ el fatâwâ (10/372).

[6] Dar-u ta’ârudh el ‘aql wa e-naql (1/27-28).

[7] Majmû’ el fatâwa (7/519).

[8] Majmû’ el fatâwa (23/346-347) ; voir également : (13/126) et (19/207-212) ; mais aussi : manhâj e-sunna (5/84-95).

[9] Majmû’ el fatâwâ (11/405).

[10] Majmû’ el fatâwâ (7/619).

[11] Majmû’ el fatâwâ (13/118).

[12] Majmû’ el fatâwâ (11/407).

ÑÏ ãÚ ÇÞÊÈÇÓ
  #2  
ÞÏíã 18 Sep 2013, 04:36 PM
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Ibn Taïmiya, un sophiste ?

(Partie 2)

Ce qui est clair pour les uns ne l’est pas forcément pour les autres

Il existe des questions qui ne s’opposent pas de façon évidente aux textes. Elles relèvent plutôt de l’effort d’interprétation (ijtihâd). Domaine dans lequel il règne une divergence entre savants. Il est possible qu’aux yeux de certains d’entre eux, ces questions soient claires comme l’eau de roche, et qu’Allah leur ait montré la vérité sur celles-ci. Cependant, cela ne leur donne pas le droit de les imposer à ceux pour qui la chose n’est pas aussi évidente…

Il est possible également qu’ils y aillent de leurs propres efforts d’interprétations. Ce qui est tout à fait compréhensible de la part de ceux qui en ont la compétence et de ceux qui font leur taqlîd… Autrement dit, ils ne sont pas condamnables…

Pour être condamnable, il faut négliger une obligation ou transgresser une interdiction, sans n’être motivé par une erreur d’interprétation tolérable ou une excuse légitime. Dans ce cas de figure, nous avons ceux qui affichent une tendance allant en opposition avec le Coran et la sunna...

Néanmoins, parfois, la chose est ambiguë. Nous ne pouvons affirmer avec certitude que telle parole ou tel acte est passible ou non d’une punition. Dans ce cas, il vaut mieux s’abstenir et laisser la chose en suspens, car : « Il vaut mieux pardonner par erreur que de punir par erreur. »[1] » [2]



Là où nous voulons en venir, c’est que l’innovation, et, en général, tout ce qui s’oppose au Coran et à la sunna peut provenir d’un individu qui est excusable, soit pour avoir fait un effort d’interprétation soit pour avoir suivi quelqu’un d’autre (taqlîd) dans les limites excusables. Il est possible également qu’il n’ait pas les moyens de parvenir à la vérité.[3]

« Quiconque s’oppose aux enseignements établis par le Coran et la sunna devient soit un mécréant, soit un pervers, soit, un désobéissant, sauf si c’est un croyant s’étant trompé suite à un effort d’interprétation. Il a droit à une récompense pour son effort, et son erreur lui est pardonnée. Il a droit à la même excuse s’il n’a pas reçu le savoir nécessaire ayant pour fonction d’établir la preuve céleste contre lui. Allah révèle en effet : [Nous n’allions châtier personne avant d’envoyer un messager].[4] Cependant, si la preuve céleste émanant des textes du Coran et de la sunna est établie contre lui, et qu’il s’y oppose ensuite, il devra recevoir la punition correspondante à son cas, et pouvant aller jusqu’à la mise à mort. »[5]

On peut à la fois être excusable devant Dieu et punit par les hommes

Le but de la punition, c’est de garder la société saine, mais, au même moment, il est possible que le coupable soit excusable soit en raison de son effort d’interprétation, ou, tout simplement, en ayant suivi aveuglément l’opinion d’un autre.[6]

Maudire un cas particulier

Sheïkh el Islam établit la règle selon laquelle, les textes maudissant un acte ne s’adressent pas forcément à tous les cas possibles. À travers certains exemples, il deviendra plus facile de l’appréhender. Nous avons d’un côté certains hadîth qui maudissent toutes les formes d’usure (ribâ el fadhl et ribâ e-nasâ), et de l’autre côté, nous avons certains Compagnons, à l’instar d’ibn ‘Abbâs ayant légitimé ribâ el fadhl. Pourtant, il ne vient à l’esprit de personne de les maudire ou de maudire tous ceux qui les ont imités. Ils furent, en effet, motivé par un effort d’interprétation, qui, en gros, ne sortait pas du cadre toléré, et quand bien même ils s’étaient trompés.

Même chose pour les savants de Koufa qui étaient convaincus que seul le vin à base de raisin ou de dates était passible de la malédiction. Ils ne voyaient pas d’inconvénient à boire du nabîdh (boisson fermentée) à base d’autres fruits, à condition, bien sûr, de ne pas en abuser sous peine de s’enivrer. Ainsi, la malédiction d’un cas particulier est soumise aux mêmes paramètres (condition à remplir et restriction à exclure) que le takfîr d’un cas particulier.[7] Par ailleurs, selon ibn Taïmiya, il est plus grave d’appliquer les textes de la menace divine (comme la malédiction) à grande échelle que de kaffar les auteurs des grands péchés à la manière des kharijites et des mu’tazilites ;[8] en sachant que le takfîr entre dans le domaine de la menace divine.[9]

Le mujtahid et le muqallid sont excusables

Ibn Taïmiya insiste tellement sur ce point, qu’il imagine une objection (qui a peut-être eu lieu) à travers une analyse d’une subtilité incroyable, comme il en a le secret ; analyse aussi déroutante qu’envoûtante : « Neuvièmement : la raison à cela, c’est que l’excuse empêche la malédiction d’atteindre un cas particulier. Nous avons vu précédemment que les hadîth sur la menace divine ont uniquement pour fonction de montrer que tel acte engendre la malédiction ; il est la cause à l’origine de la malédiction.

On peut toujours avancer que cela n’implique nullement d’applique le statut correspondant à chaque individu l’ayant commis, mais cela implique que la cause est présente, sans pour autant engendrer le statut qu’il l’entraine ; cela veut dire qu’il n’y aurait aucun mal à le faire.

Nous avons établi précédemment que le mujtahid n’est pas condamnable. Mieux, il est plus grave d’autoriser moralement un péché que de la commettre. Pourtant, l’excuse est valable pour tout le monde.

On peut avancer également qu’on ne peut être qu’un mujtahid et un muqallid pour faire un péché, en sachant que ces deux sont excusables, cela veut dire que personne n’est condamnable !

Ce à quoi nous répondons : la réponse peut se voir sous plusieurs angles :

L’un : l’ambition est de montrer que tel acte est à l’origine de la punition indépendamment de se soucier qu’il existe quelqu’un pour le faire. Dans l’hypothèse où tous les fautifs ne remplissent pas les conditions pour recevoir la punition ou que celle-ci soit annulée en raison d’une restriction quelconque, cela ne remet nullement en question que ce péché soit interdit par la religion.

L’essentiel est de savoir ou de se rendre compte qu’il est interdit en vue de s’en éloigner. Néanmoins, la miséricorde divine veut qu’un fautif éventuel soit excusable pour une raison ou pour une autre. Sur ce principe, nous avons les petits péchés, qui, bien qu’ils soient interdits, sont expiables à condition d’éviter les grands péchés. Ce principe est le même pour tous les péchés qui ne font pas l’unanimité ; notre rôle consiste à les dénoncer, mais, au même moment un fautif motivé par l’ijtihad ou le taqlîd peut être excusable. Cela ne nous empêche nullement d’être convaincus que ce péché reste un péché.

Vu sous un autre angle, quand on met en lumière son statut, c’est en vue de dissiper toute ambiguïté faisant obstacle à la punition. Quand on est excusable en raison de sa mauvaise croyance, cela ne veut nullement dire qu’on doit rester ainsi, sans faire l’effort de se renseigner dans la mesure du possible. Sinon, cela remettrait en question le devoir de propager la science ; cela signifierait qu’il vaudrait mieux dans l’intérêt des gens de les laisser ignorants. Il n’y aurait plus aucun intérêt à expliquer, avec preuves à l’appui, les questions ambigües.

Sous un troisième angle, dévoiler le statut et la menace qui plane sur un péché conforte les gens sains à s’en éloigner ; sans cette campagne de sensibilisation, ce péché prendrait du terrain dans les rangs.

Sous un quatrième angle, quand on parle d’excuse, on fait naturellement allusion à celui qui n’est pas capable d’y remédier. Sinon, dès lors qu’il est en mesure de connaitre la vérité, il n’est plus excusable pour son laisser-aller.

Sous un cinquième angle, il n’est pas évident de dire que l’ijtihâd et le taqlîd sont une excuse dans l’absolu. Il y a des cas où ils ne sont pas tolérés. Pour eux, la cause à l’origine de la menace divine est bel et bien effective, et l’ijtihâd et le taqlîd ne constituent plus une restriction dans leur cas. Ils sont donc passibles de la punition, celle-ci est même toute désignée, sauf, bien sûr, si aucune autre restriction ne vient intercéder en leur faveur (repentir, bonnes œuvres expiatrices, etc.).

De plus, l’ijtihâd et le taqlîd ne sont pas des notions constantes. Quelqu’un peut être motivé dans son acte par l’un de ses deux facteurs en pensant qu’il est en droit de le faire, mais le fait est qu’il peut soit avoir tort soit avoir raison. L’essentiel, c’est de garder la vérité entre les yeux, et de mettre les passions de côté ; auquel cas, Allah n’impose rien à l’homme qui soit au-dessus de ses forces. »[10]

Le statut d’un cas particulier

Toutes ces précautions de la part d’ibn Taïmiya ne signifient nullement qu’il n’applique jamais le takfîr sur un cas particulier. Lui-même taxe d’apostats certaines adeptes du soufisme panthéiste et jahmiste comme el Hallâj, ibn Sab’în, ibn ‘Arabî, el Qunâwî, e-Tlemceni.[11] Il n’épargne pas non plus les philosophes musulmans, à l’instar d’el Fârâbî,[12] ibn Sîna, etc.

À suivre…





[1] La première partie du hadîth est devenue une règle de fiqh, bien que les termes ne remontent pas au Prophète, mais ils viendraient plus probablement des Compagnons. En outre, sa chaine narrative est controversée ; voir : irwâ el ghalîl (2355), et dha’îf el jâmi’ e-saghîr (259) tous deux de Sheïkh el Albânî.

[2] Majmû’ el Fatâwâ (10/383-385).

[3] Majmû’ el fatâwâ (10/371).

[4] Le voyage nocturne ; 15 voir les tafsîr d’e-Tabarî et d’ibn Kathîr.

[5] Majmû’ el fatâwa (1/113).

[6] Majmû’ el fatâwâ (10/275).

[7] Majmû’ el fatâwa (20/386-388).

[8] Voir : majmû’ el fatâwa (20/263-264).

[9] Idem. (3/231).

[10] Majmû’ el fatâwâ.

[11] Voir : majmû’ el fatawa (2/175), et majmu’ e-rasâil wa el masâil (4/82, 85).

[12] Voir : dar-u e-ta’ârudh (1/10) et Majmû’ el fatâwâ (2/67, 86).
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  #3  
ÞÏíã 19 Sep 2013, 04:33 PM
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Ibn Taïmiya, un sophiste ?

(Partie 3)

Le relativisme philosophique

Le relativisme[1] est une doctrine ou un mouvement de pensée qui affirme qu'il n'existe pas de vérité absolue. Il se décline dans les différents domaines de la connaissance humaine : philosophie, épistémologie, connaissance, logique, sociologie, culture, morale. Pour le relativisme, les valeurs, la morale ou l'esthétique sont variables et dépendent des circonstances socio-historiques. Le sens et la valeur des croyances, des coutumes et des comportements humains n’ont pas de références absolues. La recherche du vrai, ainsi que les notions de bien et de mal sont liées aux circonstances et n'ont donc rien d’absolu. En tant que conception philosophique, le relativisme admet la relativité de la connaissance humaine. Niant toute référence absolue, il considère que différents points de vue et points de départ sont possibles et équivalents entre eux, ce qui rend toute objectivité impossible. Rapportant tous les éléments d'une culture à l'Homme en général, il est une forme d'humanisme.

Les détracteurs du relativisme considèrent qu'il s'agit d'une théorie présentée comme irréfutable, qui n'apporte rien et qui n'explique rien, pouvant ainsi ouvrir la voie à l'irrationnel et à l'arbitraire, notamment en politique. Ils font aussi remarquer que l'affirmation selon laquelle "il n'existe aucune vérité absolue" comporte sa propre contradiction, car si elle est vraie elle, elle doit alors s'appliquer à elle-même. La première philosophie relativiste est attribuée au sophiste grec Protagoras (485-410 av. J.-C.) dont Platon rapporte la formule célèbre : "L'homme est la mesure de toute chose".[2]

Le relativisme taïmiyen

Il existe deux vérités : subjective et objective. Il faut donc distinguer entre la représentation d’un individu d’un phénomène et sa réalité extérieure ; chacun d’entre nous est soumis à un contexte historique, culturel, spatial, etc., et est tributaire de son expérience personnelle, sa morphologie, et de sa capacité intellectuelle ; ces paramètres vont influencer son jugement qui reflète sa propre réalité, sa propre vérité ; c’est dans ce sens que l’on parle de vérité subjective.

La vérité objective est la description de ce phénomène sans influence d’aucun paramètre extérieur qui tronquerait notre jugement.

Les sophistes ne font pas cette distinction et confondent entre vérité subjective et vérité objective. Il n’y a qu’une sorte de vérité, pensent-ils, et qui est la vérité subjective. C’est pourquoi, ils conçoivent que deux jugements contradictoires soient aussi vrais l’un que l’autre. Pour eux, tout jugement est conforme à la vérité extérieure, et, sur ce point, il est impossible de se tromper. Malheureusement, la chose a échappé à un contemporain, spécialiste en philosophie, en la personne de Sâmî Nâshshâr. Néo-ash’arite notoire, il est l’auteur de l’encyclopédie nash-at el fikr el falsafî fî el islâm.[3] Il impute à ibn Taïmiya le relativisme sophiste, car ce dernier distingue entre les conceptions des uns et des autres, indépendamment de savoir, si on même moment, ils ont tort ou raison.[4]

Il s’intéresse donc au cas dont il a affaire ; il n’y a qu’une vérité absolue, mais tout dépend sous quel angle on l’aborde. Ainsi, il traite souvent un phénomène sous plusieurs considérations possibles. C’est ce qui explique pourquoi certains ont parfois du mal à le suivre. Je vais donner un exemple de son discours sur les divergences dans lequel il distingue les points de vue des uns et des autres et la vérité dans l’absolu, lorsqu’il dit : « La divergence dans les lois pratiques peut, en effet, être une miséricorde, à condition que cela n’engendre pas un grand mal (de sorte qu’on en perde la bonne réponse). C’est ce qui poussa un savant à écrire un ouvrage ayant pour titre : le livre des divergences. L’Imâm Ahmed disait qu’il faudrait plutôt l’appeler : le livre de la tolérance (kitâb e-sa’a). Cela ne veut pas dire, au même moment, qu’il n’y a pas qu’une seule vérité. Il est possible également que certains gens ignorent la bonne opinion par Miséricorde divine envers eux, car ils ne supporteraient pas de la connaitre, dans le même ordre que dans le Verset : [Ne posez pas de question sur des choses, que, si elles vous étaient dévoilées, vous en seriez lésés].[5] »[6]

Ibn Taïmiya lui-même condamne le sophisme

Ce dernier critique la doctrine selon laquelle les réalités varient en fonction des croyances des uns et des autres. Il n’y aurait pas, selon elle, de réalités invariables dont on se ferait une représentation plus ou moins fidèle, mais soumises à la conception qu’on s’en fait. En d’autres termes, personne ne pourrait se tromper, car il n’y aurait pas de vérité absolue, mais relative à chacun. Il va sans dire qu’aucune personne sensée ne peut avancer une telle assertion dans l’absolu.[7]

Ailleurs, il condamne sévèrement le sophisme qui aboutit à la zandaqa ; cela revient, en effet, à annuler la Loi et la menace divine, car chacun la prendrait selon ses goûts.[8] On ouvre la porte grande ouverte au libertinage.[9] Il classe les sophistes en quatre catégories :

Ceux qui renient les réalités et la possibilité de les connaitre,
Les sceptiques qui jouent la carte de la neutralité,
Ceux selon qui les réalités varient en fonction des croyances des uns et des autres, comme nous l’avons vu plus haut.
Et enfin ceux qui reconnaissent l’existence des réalités, mais qui renient la possibilité de les connaitre.[10]

Les détracteurs de la da’wa nadjite

Le problème, c’est que Dâwûd ibn Jarjîs ne pénètre pas les nuances dont nous avons parlé plus haut. Il attribue à ibn Taïmiya et à son élève ibn el Qaïyim un discours erroné. Il s’imagine qu’ils ne condamnent pas les pratiques païennes qui étaient répandues à son époque. Pire, il s’imagine que l’erreur dans ces domaines rapporte une récompense dans l’absolu à celui qui n’en a pas connaissance. Or, il incombe de distinguer entre l’acte auquel le Législateur donne le statut d’« association », de « mécréance » ou de « perversité » et un fautif éventuel. Le fait qu’une personne peut être excusable, cela ne rend en aucun cas son acte louable. Il y a une différence entre le statut d’un acte et le statut de son auteur.[11]

L’Imam Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb lui reproche cette tendance. Il souligne que les textes d’ibn Taïmiya qu’il utilise ne vont absolument pas dans le sens qu’il leur donne.[12] Il s’attaque ainsi, tout comme le fera plus tard Sheïkh Abâ Btîn,[13] au cœur des revendications d’ibn Jarjîs et de ‘Uthmân ibn Mansûr, qui, malheureusement, reçut sa mauvaise influence. Ces derniers prétendaient, en s’appuyant sur des textes d’ibn Taïmiya et d’ibn el Qaïyim, que tous les ignorants sans détail étaient excusables. Or, l’ignorance n’est pas une excuse en elle-même, mais l’incapacité d’avoir accès à la vérité, à condition, bien sûr, de la rechercher.

L’ouvrage kitâb mufîd el mustafîd fî kufr târik e-tawhîd fut consacré en réponse à Sulaïmân ibn ‘Abd el Wahhâb, le frère de l’Imam qui reniait le takfîr mu’aïyin dans l’absolu. Paradoxalement, il considérait que l’istighâthâ bi ghaïr Allah était du shirk asghar.[14] Ce dernier utilisait notamment le discours d’ibn Taïmiya qui s’abstenait, comme nous l’avons vu, de se prononcer sur un cas particulier avant l’iqâma el hujja. En s’inspirant d’exemples historiques et de certains passages d’ibn Taïmiya, l’Imam démontre que cette allégation est née d’une confusion énorme. Nous avons qu’ibn Taïmiya taxe d’apostats plusieurs zindîq.

Ainsi, contrairement à la tendance des murjites, pour ibn Taïmiya et les traditionalistes en général, après l’iqâma el hujja, tout individu qui commet du shirk akbar devient mécréant.

Voici un passage éloquent de ce fameux ouvrage : « Désobéir au Messager (r) dans le domaine de l’association et de l’adoration des idoles, relève, après avoir transmis le message, de la mécréance manifeste. Et cela, conformément à la nature, la raison, et aux notions élémentaires de la religion. Si on demandait au plus idiot des hommes : quel est ton avis sur celui qui désobéit au Messager (r), et qui ne se soumet pas à ses enseignements enjoignant de délaisser l’adoration des idoles et l’association, bien qu’il prétende être un musulman conforme au Prophète (r) ? Il répondra spontanément et de façon élémentaire qu’il est un kâfir. Il n’a même pas besoin d’étudier la question pour le savoir ni de questionner un savant. Cependant, les périodes où l’ignorance est répandue et où le savoir est devenu étranger, et où se multiplient les mulhidîn abordant ce sujet, la question est devenue confuse chez certains gens simples parmi les musulmans, qui aiment pourtant la vérité…

L’histoire du Prophète (r), de ses Compagnons, et des savants venus par la suite, est l’un des meilleurs moyens à même de dissiper cette confusion. Elle met en lumière la façon dont ils se comportèrent avec certaines catégories d’individus qui étaient pourtant affiliés à l’Islam. Notamment, le Prophète (r) confia à el Barrâ ibn ‘Âzib, muni de son étendard, de se rendre chez un homme qui s’était marié avec la femme de son père, pour le tuer et prendre ses biens.

Autre exemple : ils voulaient organiser une expédition punitive contre la tribu des Banû Mustalaq quand on lui apprit qu’ils refusaient de verser la zakât.

Autre exemple : Abû Bakr e-Siddîq et les Compagnons de son époque combattirent les réfractaires à la zakât. Il fit capturer leurs familles, prit leurs biens en butin, et leur donna le nom d’apostats…

Autre exemple : ‘Alî (t) jeta au bûcher ceux qui faisaient de l’excès sur sa personne…

Autre exemple : el Ja’d ibn Dirham, qui était pourtant connu pour son savoir et sa piété, fut jugé apostat à l’unanimité des successeurs des Compagnons (tâbi’îns) et des savants, etc.

Personne, parmi les premières et les dernières générations, n’a jamais reproché au premier Khalife ou à d’autres d’avoir combattu les Banû Hanîfa, sous prétexte qu’ils se soumettaient à l’attestation de foi, la prière et la zakât…

On n’a jamais entendu personne, parmi les premières et les dernières générations, reprocher ce comportement, ou ne serait-ce que de se poser des questions dessus. Personne n’a jamais trouvé étrange qu’on puisse tuer des individus affiliés à l’Islam, parce qu’ils prononçaient l’attestation de foi, ou qu’ils affichaient certains piliers de la religion. Seuls ceux d’aujourd’hui émettent de telles objections ! »[15]

À suivre…





[1] Le relativisme est un « mouvement de pensée qui traverse les siècles depuis l'Antiquité gréco-romaine », pour désigner un ensemble de doctrines variées qui ont pour point commun de défendre la thèse selon laquelle le sens et la valeur des croyances et des comportements humains n’ont pas de références absolues qui seraient transcendantes. Le succès du relativisme culturel à partir de la seconde moitié du XXe siècle, et à visée politique dans les années 1980, en Occident, a assuré la primauté et même l’exclusivité à ce sens du mot. Les détracteurs du relativisme, comme Alan Sokal, ont fait remarquer que l'affirmation selon laquelle « il n'existe aucune vérité absolue » est trivialement autocontradictoire. En effet, si la proposition est admise comme vraie, alors elle doit s'appliquer à elle-même, et est en conséquence fausse.

L'énoncé simplificateur « Tout est relatif » pourrait être soumis à cette démonstration. En fait, cet énoncé n'est jamais employé par les relativistes, sauf par boutade.

Le pragmatisme, une forme de relativisme moderne, est plus une attitude philosophique qu'un ensemble de dogmes. « Pragmatisme » vient du grec pragma, action, ce qui atteste du souci d'être proche du concret, du particulier, de l'action et opposé aux idées abstraites et vagues de l'intellectualisme. Il s'agit en fait d'une pensée radicalement empiriste : la notion d'effet pratique est étroitement liée à la question de savoir quels effets d'une théorie sont attendus dans l'expérience. Pour William James, l'application la plus célèbre de la méthode pragmatiste concerne le problème de la vérité. Cela consiste à dire que le vrai absolument objectif n'existe pas, car on ne peut séparer une idée de ses conditions humaines de production. La vérité est nécessairement choisie en fonction d'intérêts subjectifs. James développe souvent l'idée selon laquelle « "le vrai" consiste simplement dans ce qui est avantageux pour notre pensée. » (Ref. Wiki.)

[2] http://www.toupie.org/Dictionnaire/Relativisme.htm

[3] http://ashhab2.blogspot.com/

[4] http://islamtoday.net/nawafeth/artshow-86-14420.htm

[5] Le repas céleste ; 101

[6] Majmû’ el fatâwâ (14/159).

[7] Majmû’ el fatâwâ (19/135).

[8] Majmû’ el fatâwâ (19/144-145).

[9] Voir pour plus d’information : http://www.saaid.net/Warathah/Alkharashy/m/58.htm

[10] E-safdiya (1/97-98).

[11] Idem.

[12] kashf e-shubhataïn (p. 80-81).

[13] Sheïkh ‘Abd Allah Abâ Btîn se chargea donc de réfuter la tendance erronée véhiculée par Dâwûd ibn Jarjîs et ibn ‘Ajlân. Ces deux hommes l’imputaient à ibn Taïmiya et son élève ibn el Qaïyim comme nous l’avons vu. Ils prétendaient que l’erreur d’interprétation rapportait systématiquement une récompense en plus du fait qu’elle était excusable. Ils voulaient faire passer l’idée que seul un obstiné pouvait sortir de l’Islam. Le suivisme aveugle et l’ignorance seraient, à leurs yeux, dans tous les cas excusables.

[14] Sulh el ikhwan min ahl al-imam (p. 121) ; voir également : e-sawâ’iq el ilâhiya de Sulaïmân ibn ‘Abd el Wahhâb (p. 6).

[15] Idem. (6/214-215).
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ÞÏíã 22 Sep 2013, 04:43 PM
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Ibn Taïmiya, un sophiste ?

(Partie 4)


kitâb mufîd el mustafîd fî kufr târik e-tawhîd


Le livre en question fut récemment l'objet d'une recension du D. Hamad el ‘Aslânî et fut préfacé par le D. ‘Abd e-Lâtîf Âl e-Sheïkh (l’auteur de la thèse Nawâqidh el îmân el qawliya wa el ‘amaliya et ayant eu parmi les membres du jury, Sheïkh Luhaïdân, et Sheïkh ‘Abd e-Rahmân el Barrâk). Publié en 2010, le D. Hamad explique en introduction qu’il s’inscrit en contre courant avec deux tendances extrêmes ; l’une tendant sans s’en rendre compte vers le kharijisme et l’autre vers le murjisme. La première, encline au takfîr à outrance, ne tient pas compte du facteur de l’ignorance, et l’autre, mu par un scrupule outrancier, interdit le takfîr d’un cas particulier dans l’absolu.[1] Il n’oublie pas en fin d’introduction de remercier notamment le D. ‘Abd e-Rahmân Mahmûd qu’il considère comme son Sheïkh.[2]


Or, deux passages de l’Imâm lui ont posé problème ; le premier où il ramène un extrait d’ibn Taïmiya dans lequel il kaffar ceux qui immolent pour des créatures.[3] Voici ce qu’on peut lire en bas de note : « Voici l’un des passages de l’auteur [en parlant de Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb] qui m’a posé un problème de compréhension. Sheïkh el Islâm [ibn Taïmiya] établit qu’un groupe d’hypocrites qui immolent pour des créatures sont des mécréants, sans les nommer précisément ni spécifiquement. Il parle de tout le monde et de n’importe qui. Comment lui imputer alors qu’il parle de cas particuliers ? Je pense, wa Allah a’lam, qu’en fait, Sheïkh el Islâm théorise le statut absolu (hukm el mutlaq) de l’immolation pour une créature. Quant au statut d’un cas particulier (hukm el mu’ayyin), il est soumis à des conditions et restrictions, comme il l’établit dans ses nombreux ouvrages. »[4]


Dans l’autre passage, l’Imâm cite un autre extrait d’ibn Taïmiya dans lequel il kaffar ceux qui invoquent des créatures en dehors d’Allah.[5] Et, nous pouvons lire la réaction en bas de note : « Voici l’autre des passages de l’auteur [en parlant de Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb] – qu’Allah lui fasse miséricorde – qui m’a posé un problème de compréhension. Sheïkh el Islâm [ibn Taïmiya] évoque le takfîr de ceux qui invoquent des créatures en dehors d’Allah, comme le Prophète ou un wali, mais sans les désigner en particulier, en sachant qu’ils sont très nombreux dans ce cas. Surtout à notre époque où les quburites font légion partout dans le monde, wa Allah el musta’ân ! Comment lui imputer alors qu’il parle de cas particuliers ? Je pense, wa Allah a’lam, qu’il s’agit du hukm el mutlaq de l’invocation des créatures. »[6]


Plus loin, il explique que de grandes références néo-ash’arites, à l’image d’ibn Hajar el Haïtamî, ont été fortement influencées par le soufisme qui prône l’invocation des créatures. El Haïtamî lui-même autorisait d’invoquer le Prophète, mais aussi l’istighâtha bi e-nabî, et l’isti’âna bi e-nabî. (Voir sur le sujet la thèse : ârâ ibn Hajar el Haïtamî el i’tiqâdiya de Mohammed Shâi’).[7]


Dans la préface, le D. ‘Abd e-Lâtîf Âl e-Sheïkh résout ces deux problèmes en soulignant que l’auteur consacra son livre en réfutation à son frère Sulaïmân ibn ‘Abd el Wahhâb qui contestait d’emblée le takfir de ces deux catégories d’individus (ceux qui immolent pour des créatures, et ceux qui invoquent des créatures en dehors d’Allah) soit le hukm el mutlaq, comme le mentionne son livre fasl el khitâb fî e-radd ‘alâ Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb. Par ailleurs, ajoute-t-il, le takfîr dans l’absolu s’applique à des cas particuliers après l’iqâma el hujja (la transmission de la preuve céleste).[8]


L’Imam lui-même reconnait le principe d’iqâma el hujja


Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb et son petit-fils ‘Abd e-Latîf reprennent les paroles suivantes d’ibn Taïmiya : « Quant à moi, – ceux qui s’assoient avec moi le savent très bien –, je compte parmi les gens qui défendent avec le plus d’acharnement de condamner une personne en particulier soit de kâfir, soit de fâsîq soit de ‘âsî (…) j’expliquais que les paroles des anciens et des grandes références qui parlent du takfir el mutlaq en disant : celui qui fait telle et telle chose est un kafir ; j’expliquais qu’elles étaient justes, mais qu’il incombait également de faire la différence entre le mutlaq (le cas général) et le mu’aïyin (le cas particulier). »[9]


Puis, le premier homme de la da’wa najdite fait le commentaire suivant : « Voici sa tendance sur la question dans tous les passages que nous avons trouvé de ses ouvrages. Il ne parle pas du takfîr mu’aïyin sans le faire suivre d’une explication qui vient dissiper toute confusion. Autrement dit, il s’abstient de kaffar un cas particulier avant que la hujja ne lui soit parvenue. Après cela, il donne le statut correspondant (takfîr, tafsîq, ma’siya) au cas en question… »[10]


En parlant de Sheïkh el Islâm ibn Taïmiya, ibn ‘Abd el Wahhâb confie : « La croyance à laquelle nous adhérons et la religion que nous professons et pour laquelle nous espérons la récompense d’Allah, c’est que, s’il se trompe ou si quelqu’un d’un meilleur rang que lui se trompe dans cette question ; autrement dit, dans la question disant que si le musulman commet l’association (ashraka) après iqâma el hujja (…) ou tout autre acte de mécréance manifeste et incontestable (el kufr e-sarîh e-zhâhir) qu’Allah a clarifié, ainsi que Son Messager et les savants de la communauté ; je donne foi aux enseignements d’Allah et de Son Messager qu’il devient kâfir, indépendamment de savoir qui peut se tromper sur la question. Que dire alors, wa el hamd li Allah, si l’on sait que nous ne connaissons aucun savant aller à l’encontre de cette question. »[11]


L’Imam se contredit-il ?


Sheïkh ‘Abd el Karîm el Khudhaïr, actuellement membre de l’Ordre des grands savants d’Arabie Saoudite, explique notamment, à l’instar de Sheïkh el ‘Uthaïmîn,[12] que la divergence entre savants traditionalistes sur la question du ‘udhr bi el jahl, se situe au niveau de la transmission et de la compréhension de la hujja. Si, pour certains, celle-ci n’est pas indispensable, d’autres voient en l’ignorance une restriction possible qu’il incombe d’évacuer avant de se prononcer sur un cas particulier. Le Sheïkh rejoint cette dernière position, et compare l’ignorant au non-arabophone à qui il incombe de traduire la hujja, afin de la lui faire accepter. Il reconnait que de nombreux musulmans pénètrent mal le sens de l’attestation de foi à laquelle ils adhèrent pourtant. C’est ce qui les fait sombrer dans des annulations de l’Islam sans s’en rendre compte.


Il préconise de les sensibiliser sur les pratiques païennes répandues à notre époque, et de leur faire comprendre qu’elles excluent de la religion. Néanmoins, cela ne permet pas de condamner un tel et un tel à la mécréance, en tout cas, pas avant de leur avoir fait réaliser la gravité de leur action, par le biais d’un discours adapté à la situation. Il incombe donc de distinguer entre l’acte de shirk qui exclue de la religion, et le statut d’un fautif éventuel, qui est soumis à une enquête préalable.


C’est ce qui explique, nous dit-il, la confusion qui règne sur les écrits du Sheïkh Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb, qui, à priori, semblent se contredirent. Il lui arrive, en effet, d’accorder l’excuse de l’ignorance à certains, là où ailleurs, il est intransigeant sur leur cas. En réalité, il est possible d’accorder entre ses positions, car elles varient en fonction du contexte et des cas rencontrés.


Notons enfin que ce discours concerne les individus affiliés à l’Islam, mais il sera différent avec des non-musulmans, comme les Juifs et les chrétiens, qui sont voués à l’Enfer éternel, sans la moindre contestation possible.[13]
Recommandations


Quoi qu’il en soit, en conclusion, le D. Hamad el ‘Aslânî propose un certain nombre de recommandations, dont :
  • Dans l’optique d’ibn Taïmiya, en dehors des Prophètes, personne parmi les savants n’échappe à la contradiction, l’erreur, et l’oubli[14] ; lui-même relève certaines imprécisions de l’Imâm. C'est pourquoi il recommande de s’accrocher aux preuves textuelles et au consensus des anciens.
  • Il recommande également de restaurer les ouvrages des savants de aimmat e-da’wa dans un esprit objectif et rigoureux.
  • Le Coran et la sunna sont la référence absolue dans le domaine du takfîr, et son application revient aux savants de confiance, non à l’étudiant de bas niveau ni au musulman lambda.
  • Il incombe de distinguer entre le takfîr el mutlaq et le takfîr el mu’ayyin.
  • Le takfîr el mu’ayyin est soumis à des critères qu’il incombe de respecter avant de se prononcer.
  • Le takfîr el mu’ayyin entraine des sanctions très lourdes ; l’apostat est privé de certains droits (mariage, héritage), et on n’a pas le droit de manger sa viande, contrairement au mécréant d’origine, etc.[15] en outre, il est passible de la peine de mort, d’où les précautions extrêmes que les savants prennent avant de condamner quelqu’un à l’apostasie.[16]


À suivre…


Par : Karim Zentici
http://mizab.over-blog.com/





[1] Voir la recension de kitâb mufîd el mustafîd fî kufr târik e-tawhîd du D. Hamad el ‘Aslânî (p. 14-15) ; il réfute sans le citer nommément le commentaire de l’ouvrage en question, et ayant pour titre : fath el ‘Alî el Hamîd fî sharh kitab mufîd el mustafîd de Midhat el Farrâj.

[2] Voir la recension de kitâb mufîd el mustafîd fî kufr târik e-tawhîd du D. Hamad el ‘Aslânî (p. 21).

[3] Iqtidâ e-sirât el mustaqîm (2/565-566).

[4] Voir la recension de kitâb mufîd el mustafîd fî kufr târik e-tawhîd du D. Hamad el ‘Aslânî (p. 120).

[5] Majmû’ el fatâwâ (3/383-400).

[6] Voir la recension de kitâb mufîd el mustafîd fî kufr târik e-tawhîd du D. Hamad el ‘Aslânî (p. 139).

[7] Voir la recension de kitâb mufîd el mustafîd fî kufr târik e-tawhîd du D. Hamad el ‘Aslânî (p. 169-170).

[8] Voir la recension de kitâb mufîd el mustafîd fî kufr târik e-tawhîd du D. Hamad el ‘Aslânî (p. 11) ; Sheïkh ‘Abd el Karîm el Khudhaïr, comme nous allons le voir, rejoint ce discours. Sheïkh ‘Abd e-Rahmân ibn Hasan a une autre explication sur la chose. à ses yeux, à ses débuts, l’Imâm n’annonçaient pas ouvertement le takfîr, en vue d’attirer ses contemporains de la Péninsule à l’Islam ; non qu’il pensait qu’ils étaient musulmans, mais l’intérêt supérieur de sa prédication réclamait d’être diplomates. Voir : e-durar e-saniya (2/121).

[9] Dans majmû’ el fatâwa (3/229).

[10] Voir : kitâb mufîd el mustafîd fî kufr târik e-tawhîd inclus dans majmû’ muallafât e-Sheïkh (6/203-204).

[11] muallafât wa rasâilihi e-sheikh Mohammed (1/290-291).

[12] Voir : Fatâwâ arkân el islâm

[13] http://www.khudheir.com/text/4072

[14] Majmû’ el fatâwâ (29/42).

[15] Majmû el Fatâwâ (28/534-535).

[16] Voir la recension de kitâb mufîd el mustafîd fî kufr târik e-tawhîd du D. Hamad el ‘Aslânî (p. 213-215).
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ÞÏíã 20 Oct 2013, 08:38 AM
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Ibn Taïmiya, un sophiste ?

(Partie 5)

Nous devons prendre la vérité d’où qu’elle vienne

Dans le hadîth rapporté par el Bukhârî, le Messager d’Allah (r) s’est adressé à Abû Huraïra en ces termes, en parlant de Satan : « Il t’a dit vrai, lui le grand menteur ! »

‘Abd Allah ibn Mas’ûd : « N’associe rien à Allah et tourne-toi toujours du côté du Coran. Accepte la vérité même d’un « étranger » pour qui tu as de l’aversion ; et refuse le faux même d’un proche pour qui tu as de l’affection. »[1]

Abd e-Rahman ibn Mahdî jette les bases de l’investigation moderne : « les traditionalistes évoquent les choses qui sont en leur faveur, mais aussi celles qui sont en leur défaveur. Quant aux « gens des passions », ils évoquent uniquement les choses qui sont en leur faveur. »

Ibn Taïmiya souligne que les adeptes des religions falsifiées et les égarés en général s’appuient généralement sur des arguments ambigus au détriment des arguments formels, trahissant ainsi qu’ils sont plus animés par les passions que par la recherche de la vérité.[2] Ce manque de bonne foi ou, pour le moins, ce manque de rigueur les fait sombrer dans les contradictions les plus aberrantes.

Après s’être inspiré d’un passage d’el ‘aqîda e-nazhâmiya (p. 25) d’Abû el Ma’âlî el Juwaïnî, qui était un adepte du tafwîdh, ibn Taïmiya fait le commentaire suivant : « Les références auxquelles nous nous rapportons, parmi les adeptes du kalâm ou autres, ne nous rejoignent pas forcément dans tous les points que nous établissons dans ce domaine. Néanmoins, il faut recevoir la vérité d’où qu’elle vienne. Mu’âdh ibn Jabal disait cette fameuse parole : « Il faut accepter la vérité de n’importe qui, même d’un mécréant – ou bien a-t-il dit : même d’un pervers –. Et méfiez-vous des erreurs du sage.

Comment peut-on savoir qu’un mécréant dit la vérité, lui demanda-t-on ?
La vérité dégage une lumière, a-t-il répondu, ou bien a-t-il dit une parole de ce genre. »[3] … »[4]

Ce n’est pas parce que certains innovateurs tirent à leur avantage certains textes d’ibn Taïmiya et de son élève qu’il faut les rejeter. Il suffit simplement de les orienter dans le bon sens. Sheïkh Sulaïman ibn Sahmân rapporte les paroles suivantes d’ibn Jarjîs : « Il n’est pas simple de kaffar le musulman. Les savants, comme Sheïkh ibn Taïmiya et ibn el Qaïyim, sont unanimes à dire que l’ignorant et celui qui commet une erreur et appartenant à cette communauté, fait un acte qui, en principe doit le rendre mushrik ou kâfir, est excusable (ya’dhur bi el jahl wa el khata), jusqu’à ce qu’il ait connaissance de la preuve prophétique de façon claire et limpide et qu’il n’ait aucune confusion sur la question. »[5]

Puis, ibn Sahmân explique : « Quant à taxer de kâfir un musulman, nous avons vu que les wahhabites ne kaffar pas les musulmans. Sheikh Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb – qu’Allah lui fasse miséricorde – fait partie de ceux qui prennent le plus de précautions avant de se prononcer sur le takfîr, à tel point qu’il n’est pas formel sur l’ignorant qui implore un autre qu’Allah parmi les occupants des tombes ou autres, s’il ne trouve personne pour le conseiller et pour lui faire parvenir la hujja par laquelle tous ceux qui s’y opposent deviennent mécréant. »[6]

C’est exactement le discours d’ibn Taïmiya disant : « En principe, toute parole qui relève de la mécréance, selon le Livre d’Allah, la sunna et le consensus des savants, est jugée ainsi dans l’absolu (qawl yutlaq), comme le prouvent les arguments textuels ; la foi fait partie des lois qui émanent d’Allah et de son Messager. Elle n’est pas laissée à l’initiative des hommes laissant libre court aux passions et aux suspicions. De plus, toute personne disant ces paroles n’est pas nécessairement un kâfir sans remplir les conditions ni écarter toute restriction possible pour le devenir. »[7]

‘Abd e-Latîf ibn ‘Abd e-Rahmân reprend ce passage avant de faire le commentaire suivant : « C’est exactement ce que nous disons. Nous n’ajoutons pas une lettre à ce discours. Il est même plus catégorique que le nôtre ; il renferme le takfîr de certains points subsidiaires qui sont bien loin de la question sur laquelle nous divergeons…

Notre Sheïkh Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb établissait dans ses assemblées et ses lettres qu’il n’avait pas recours au takfîr avant l’iqâma el hujja… si telle était la tendance de notre Sheïkh – qu’Allah lui fasse miséricorde –, alors comment peut-on lui imposer… et prétendre qu’il kaffar sans faire de détail. »[8] Sulaïmân ibn Sahmân a retranscrit les paroles précédentes de son Sheïkh sans en faire le moindre commentaire, ce qui a valeur de consentement.

Plus loin, il répond à une accusation accolée à ibn ‘Abd el Wahhâb en disant : « Les paroles de Sheïkh el Islâm dans lesquelles il s’abstient de kaffar des cas particuliers font allusion à des questions bien précises, et pour lesquelles il est peut-être difficile pour certains gens de pénétrer les arguments… Leur opinion qui implique de renier les textes relève ainsi de la mécréance, mais nous ne taxons pas leur auteur de kâfir, car il est possible qu’une restriction fasse obstacle à notre jugement ; des restrictions comme l’ignorance, la méconnaissance du texte en question ou de ses arguments. Les Lois divines ne sont pas imposables aux hommes avant qu’elles ne leur soient parvenues.

Son texte [en parlant d’ibn Taïmiya] fait allusion aux innovateurs. D’ailleurs, il le dit explicitement lui-même. Après avoir exposé, en effet cette question où il cite certains leaders du kalâm, il conclut : « Il est possible, pour les questions subtiles, de ne pas kaffar le fautif, contrairement aux questions claires et évidentes, ou qui touchent aux notions élémentaires de la religion. Auquel cas, il devient un mécréant sans la moindre hésitation. » »[9]

Or, nous avons vu à maintes reprises qu’aux yeux d’ibn Taïmiya la notion de subtilité est relative ; celle-ci varie en fonction des époques, des endroits et des personnes. De nombreux passages de ses ouvrages vont dans ce sens. Il va jusqu’à donner des circonstances atténuantes à des ignorants influencés par le jahmisme et le monisme-panthéisme,[10] alors que, comme nous l’avons vu plus haut, il kaffar leurs leaders. Mieux, il va jusqu’à trouver des excuses à des ignorants imprégnés du dogme ésotérique, l’une des croyances les plus éloignées de l’Islam.[11] Au sujet d’un autre passage d’ibn Taïmiya, ibn Sahmân dit explicitement : « Les paroles d’ibn Taïmiya sont vraies et incontestables. Un homme sensé, et à fortiori un savant, ne peut nullement les contester. Nous y donnons foi et c’est exactement notre croyance. »[12]

À suivre…





[1] Sharh e-sunna d’el Baghawî (1/199).

[2] Voir notamment : El Jawâb e-Sahîh li man baddala din el Masîh (2/710) et majmû’ el fatâwa (3/62-63).

[3] Rapporté par Abû Dâwûd (5/17-18).

[4] Majmû’ el fatâwa (5/101-104).

[5] Ce passage ressemble étrangement à celui d’ibn el ‘Arabî (m. 543 h.), l’auteur des paroles : « Si l’ignorant ou celui qui commet une erreur parmi les adeptes de cette communauté, fait un acte de kufr ou de shirk qui en principe, le rend soit mushrik soit kafir, il est excusable en raison de son ignorance et de son erreur (ya’dhur bi el jahl wa el khata) jusqu’à ce que lui soit établit de façon claire et limpide, loin de toute confusion, la preuve d’Allah qui voue à la mécréance celui qui ne s’y soumet pas ; et qu’il renie ensuite un point élémentaire de la religion (ma’lûm min e-dîn bi e-dharûra), relevant du consensus recensé de façon sûre, et que tout musulman connait machinalement et sans réfléchir. » Voir : tafsîr el Qâsimi (5/1307-1308).

[6] Dhiyâ e-shâriq (p. 371-372).

[7] Majmû’ el fatâwa (1/113).

[8] Kashf e-shubhataïn (p. 75-76).

[9] Idem. (p. 83).Voir également : Kashf el awhâm wa el iltibâs d’ibn Sahmân (p. 48).

[10] Voir : E-rad ‘alâ el bakrî (2/494) et Majmû’ el fatâwa (1/113).

[11] Voir : Sharh el asbahâniya (p. 628-629).

[12] Kashf e-shubhataïn (p. 68).
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ÞÏíã 21 Oct 2013, 03:55 PM
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Ibn Taïmiya, un sophiste ?

(Partie 6)

Fatwâ taïmiyenne sur le ‘udhr bi el jahl dans le shirk akbar

En donnant un exemple concret, il sera plus facile de se représenter l’approche d’ibn Taïmiya, que de mieux pour se faire qu’une fatwa :

Question : Que disent nos maitres érudits parmi les grandes références (y) sur des individus qui encensent des Sheïkh, en suppliant leur secours dans les moments difficiles, avec une grande dévotion ; ils consacrent des visites à leurs sépultures dont ils embrassent les murs, et dont ils prennent la terre pour la baraka. Ils y laissent brûler des lampes toute la nuit lors d’une veillée annuelle qu’ils ont baptisée laïla el mahyâ. Ils viennent de très loin pour s’y rendre et la considère comme l’aïd. Ils y consacrent également des vœux et des prières autour.

Ces pratiques leur sont-elles interdites, voire déconseillées ? Ces Sheïkh en question, doivent-ils les laisser faire, ou bien sévèrement les condamner ? Qu’est-ce qu’ils doivent enseigner et transmettre à leurs disciples ? En outre, ont-ils le droit de leur décerner des autorisations d’enseigner (ijâza) dans d’autres régions ? Et d’acquiescer les tours qu’ils font avec des serpents, du feu, etc. ? Quel rôle doivent jouer les imams des mosquées qui participent à leurs chants et qui cautionnent leurs pratiques ? Quelle position doivent adopter les autorités en vue de les réprimer ?

Nous voulons votre avis, soyez-en récompensé !

En réponse : Louange à Allah, le Seigneur de l’Univers ! Appeler au secours un homme parmi les morts ou les absents ; l’implorer dans l’adversité et lui demander d’arranger ses affaires en hélant : mon maitre Sheïkh un tel ! Je me place sous ta protection et ton entourage !

Implorer en se plaignant d’une agression ennemie, d’une maladie, ou de la pauvreté : mon maitre un tel ! En vue d’attirer son attention et de solliciter son aide ; ses pratiques viennent d’un égaré, ignorant, « associateur » (mushrik), et désobéissant à l’unanimité des musulmans. Il règne, en effet, un consensus sur l’interdiction d’invoquer un mort (prophète, Sheïkh, etc.) ou de lui demander quoi que ce soit.

Il est toléré, toutefois, de solliciter les services d’un autre à condition qu’il soit vivant et présent au moment de la demande. Les Compagnons soulevaient leurs affaires au Prophète (r) au cours de sa vie, et quand viendra le Jour de la résurrection, il pourra intervenir en faveur des croyants ; c’est la forme de sollicitation (tawassul, istighâtha) reconnue par la Loi. El Bukhârî et d’autres spécialistes rapportent un hadîth authentifié, remontant à Anas ibn Mâlik, et selon lequel : quand les musulmans furent frappés par la sécheresse à l’époque d‘Omar, ce dernier organisa la prière de la pluie, et sollicita le Seigneur par le biais d’el ‘Abbâs en disant : « Ô Allah ! Quand nous étions éprouvés par la sécheresse à l’époque de Ton Prophète, nous Te sollicitions par son biais, et Tu nous donnais la pluie ! Aujourd’hui, nous Te sollicitons par la personne de son oncle afin que Nous nous exauce ! »

Anas rapporte ensuite qu’Allah les exauçait.[1]

Ainsi, le tawassul et la shafâ’a consistait à l’époque du Prophète (r) de solliciter ses invocations et son intercession. Après sa mort, les gens se tournèrent vers son oncle, dont les invocations et l’intercession étaient plus à même d’être reçues en raison de son lien de parenté avec le meilleur des hommes. Il ne vint à l’esprit de personne de solliciter directement l’aide du Messager d’Allah (r) ni ses prières. Personne ne se rendit auprès de sa tombe pour prier Dieu. Pour fermer la porte à toute tentation, il prescrivit : « Ne faites pas de ma tombe un lieu de cérémonie, et priez sur moi d’où que vous soyez, car vos prières m’y sont transmises. »[2] ; « Ne faites pas de ma tombe une idole à qui on rend le culte. »[3] ; « Maudits soient les juifs et les chrétiens qui ont fait des tombes de leurs prophètes des lieux de prières. »[4] Le rapporteur[5] précise : « Il mettait en garde contre leurs pratiques. » ; « Les civilisations avant vous prenaient les tombes de leurs prophètes pour lieu de prière, mais ne le faites pas, car je vous l’interdis. »[6]

Les savants (y) en ont conclu qu’il est interdit de construire des mosquées sur des tombes. Si l’on sait que cette interdiction englobe les prophètes et les vertueux, et que le Messager d’Allah (r) interdit de consacrer des prières dans leur périmètres ; que dire alors dans la situation où les visiteurs sollicitent directement l’occupant de la tombe dans les invocations, jurent par lui, se prosternent devant lui, et passent la main dessus en vue de la baraka ? Ces pratiques relèvent clairement de l’association.

Allah (I) révèle : [Dis : invoquez ceux qui sont supposés être vos divinités en dehors d’Allah ; ils ne détiennent pas la moindre part du royaume des cieux et de la terre ; ils n’y ont aucun partage, et aucun d’eux ne Lui vient en soutien • Aucune intercession n’est valable auprès de Lui sans n’avoir reçu Son accord préalable][7] ; [Dis-leur : invoquez ceux que vous prenez pour divinités en dehors de Lui ; Ils ne peuvent ne vous dissiper aucun malheur ni même l’écarter ailleurs • Ceux-là mêmes qui reçoivent leurs invocations recherchent le moyen d’être le plus proche de leur Seigneur ; ils espèrent en Sa Miséricorde et redoutent Son châtiment ; le châtiment de Ton Seigneur était vraiment redoutable].[8]

Selon une opinion des anciens, certains gens invoquaient les anges et les prophètes à l’image du Messie et d‘Uzaïr. Le Très-Haut les réprimande en leur rappelant que ceux-là sont Mes créatures (ou serviteurs) tout comme vous ; ils espèrent en Ma Miséricorde, et redoutent Mon châtiment ; ils cherchent, tout comme vous, à se rapprocher de Moi, et ils Me craignent également. Un autre Verset nous apprend : [Il n’appartenait pas à un homme ayant reçu le livre, la sagesse, et la prophétie, de demander ensuite à ses semblables de l’adorer en dehors d’Allah, mais il leur dira plutôt : soyez des docteurs de la loi pour avoir enseigné le Livre et pour l’avoir étudié • Et Il ne vous ordonne non plus pas de prendre pour seigneurs les anges et les prophètes ; vous inciterait-il à la mécréance, après que vous ayez été musulmans ?][9] Il nous enseigne que l’adoration des anges et des prophètes était une forme de mécréance ; en sachant que les fautifs en questions ne faisaient que les invoquer. Il ne venait à l’idée de personne qu’ils auraient participé à l’ordre des choses.

C’est ce qui explique pourquoi le Coran condamne les chrétiens en ces termes : [Ils ont pris leurs moines et leurs prêtres pour des seigneurs en dehors d’Allah ainsi que Jésus, fils de Marie. Pourtant, il ne leur avait été ordonné de n’adorer qu’un seul dieu. Nulle divinité en dehors de Lui. Glorifié soit-Il au-dessus de leur association !][10] Aucun d’eux ne pensait que ces fameux moines et prêtres avaient prêté leur main à la création des cieux et de la terre. Leur crime fut d’en avoir fait des seigneurs (divinités ndt.).

Ainsi, si on devient païen en appelant au secours un prophète qui n’est plus de ce monde, que dire alors quand le mort en question n’a pas un rang aussi noble ?

C’est ce qui nous amène à répartir les visites funéraires en deux catégories : hérétiques et légales. Les visites légales ont pour but d’invoquer en faveur du défunt, au même titre que la prière mortuaire, à travers la formule : « Le salut à vous parmi les occupants croyants de cette demeure, et que nous rejoindrons bientôt, par la volonté d’Allah ! Qu’Allah fasse miséricorde aux plus anciens d’entre vous et aux plus récents ! Nous implorons Allah de vous préserver et de nous préserver ici-bas et dans l’au-delà ! Ô Allah ! Ne nous prive pas de la récompense de leur visite, et ne nous éprouve pas après les avoir repris ! Pardonne-nous et pardonne-leur ! »[11] Cette formule est une forme de prière mortuaire.

La visite hérétique, est, quant à elle, une forme d’association de même nature que celle des chrétiens (ex. : invoquer le mort, l’appeler au secours, jurer par lui devant Dieu, embrasser sa tombe et passer la main dessus, se prosterner devant, et se frotter les joues à l’occasion de sa visite, etc.). Ces pratiques, qui n’ont aucun lien avec la religion musulmane, impliquent soit de demander directement au mort de résoudre ses affaires, soit de les résoudre par son intermédiaire. Ni le Messager d’Allah (r) ne les a légiférées, ni les Compagnons ne les ont usitées, ni aucune grande référence ne les a recommandées. C’est même le contraire qui est vrai, car ils les ont purement interdites. Il règne même un consensus qui défend d’embrasser la tombe du sceau des prophètes (r), de passer sa main dessus, ou de se prosterner devant. Il est pourtant le meilleur des hommes, le plus honoré par Allah, et le « moyen » le plus proche de parvenir à Lui ; si l’on sait qu’il détient le meilleur rang auprès de Lui, alors à fortiori, il n’est pas permis de le faire pour un autre.

Or, certains imputent au meilleur des hommes (r) qu’il aurait dit : « Si vous demandez quelque chose à Allah, alors faites-le par mon rang. »[12] Ce hadîth est inventé ; il n’a été rapporté par aucun spécialiste et n’est fait mention dans aucun recueil de référence. Il n’est pas légiféré non plus, à l’unanimité des musulmans, d’allumer des lampes sur les tombes des prophètes, des pieux de la maison prophétique, etc. ni d’y accrocher des tapis. Personne de la communauté parmi les grandes références et autres ne l’a jamais fait. Aucun grand imam ne l’a jamais recommandé. En revanche, nous avons dans les recueils sunan un hadîth certifié selon lequel le Prophète (r) a dit : « Allah maudit les femmes qui multiplient les visites des tombes et ceux qui installent dessus des lieux de culte ou des lanternes. »[13] Tirmidhî commente ensuite : « Ce hadîth est bon. »

On n’est pas astreint au vœu de déposer des huiles, bougies, lampes, tapis sur des tombes, étant donné qu’il n’est pas légitimé. Je ne connais pas un érudit contestant ce point. Néanmoins, il existe deux opinions sur la question de savoir si on doit l’expier ou non. Il y a bien d’autres pratiques hérétiques et condamnables: se ressembler autour d’une tombe en vue de réciter la khatma du Coran, des prières, du dhikr, ou des chants, etc.

Le législateur (r) préconise : « Ne faites pas de ma tombe un lieu de cérémonie... »[14] Ce hadîth est notamment rapporté par les auteurs des sunan comme Abû Dâwûd.

Si l’interdiction porte sur sa propre tombe, alors elle porte à fortiori sur la tombe de n’importe qui d’autre. Le « lieu de cérémonie » (l’aïd) est le lieu où on a l’habitude de se rassembler à un moment précis de l’année, comme ‘Arafâ, Muzdalifa, Minâ. L’aïd en question peut correspondre à une période où on a l’habitude de se réunir, comme la fête de l’aïd à la fin du ramadhân, et de l’immolation.

Le Messager d’Allah (r) a rendu mécréants les païens arabes ; il les a combattus par l’épée, et il a légitimé leur sang et leur richesse. Pourtant, ils ne disaient nullement que leurs idoles avaient participé à la création du monde. Ils reconnaissaient qu’Allah était seul à avoir créé les cieux, la terre et tout l’univers, comme l’indiquent les Versets : [Si tu leur demandais qui avait créé les cieux et la terre, ils répondraient : c’est Allah][15] ; [Dis : à qui appartient la terre et tous ses occupants, si vous saviez vraiment ? • Ils diront : c’est Allah… Comment pouvez-vous vous laisser envouter ?][16] ; [La plupart d’entre eux croient en Allah, mais ils Lui vouent un associé dans l’adoration].[17]

Selon certains anciens, si tu leur demandes qui a créé les cieux et la terre, ils diront que c’est Allah, alors qu’ils adorent d’autres divinités. Leur adoration consistait à les invoquer et à les prendre pour des intermédiaires, des « moyens », des intercesseurs auprès d’Allah. Tout coupable de telles pratiques est un païen, et cela proportionnellement à son degré d’engagement. Si quelqu’un se voit établir la preuve contre lui pour avoir commis ce fameux shirk, et qu’ensuite il continue à le faire, il incombe de le mettre à mort et de lui réserver le même traitement que les païens ; il ne faut pas l’enterrer dans un cimetière musulman ni prier préalablement sur lui. Quant à l’ignorant qui n’a reçu aucun savoir (sur le sujet) et qui ne pénètre pas la substance du shirk pour lequel le Prophète (r) fit verser le sang des païens, on ne peut le taxer d’apostat (lâ yuhkam bi kufrihi), surtout dans la mesure où ce genre de shirk s’est répandu dans les rangs des adeptes affiliés à l’Islam. En ayant pour croyance que ces pratiques sont des actes de dévotion et d’obéissance, on est un égaré à l’unanimité des musulmans, et, après iqâma el hujjâ, un mécréant.

Il incombe aux musulmans et plus particulièrement aux responsables des autorités d’interdire ces pratiques et de les éradiquer par tous les moyens, en infligeant notamment une punition légale à tout récidiviste, wa Allah a’lam ![18]




[1] Rapporté par el Bukhârî (1010, 3710, et ibn Khuzaïma (1421).

[2] Rapporté par Abû Dâwûd (2042) et Ahmed (2/367), selon Abû Huraïra (t).

[3] Rapporté par Ahmed (7352), et Mâlik (172).

[4] Hadîth rapporté par el Bukhârî (435) et Muslim (531).

[5] En l’occurrence ‘Âisha – qu’Allah l’agrée – (N. du T.).

[6] Hadîth rapporté par Muslim (532), selon Jundub ibn ‘Abd Allah.

[7] Saba ; 22-23

[8] Le voyage nocturne ; 56-57

[9] La famille d’Imrân ; 79-80

[10] Le repentir ; 31 En s’inspirant de ce Verset, ibn Taïmiya souligne : « Beaucoup d’adeptes mystiques se plient à la volonté de personnes encensées à leurs yeux dans tout ce qu’elles ordonnent, même si elles rendent licite un interdit ou illicite les bonnes choses. » Iqtidâ e-sirât el mustaqîm (1/90). Dans bughya el murtâd (p. 496-497), il renchérit : « Dans ce registre, l’égarement a gagné certaines tendances à la manière des chrétiens. »

[11] Hadîth rapporté par Muslim (975), selon Buraïda sans la dernière partie qui est consacrée à la prière mortuaire.

[12] L’auteur en parle dans majmû’ el fatâwâ (1/319, 346, 24/335, 27/126).

[13] Rapporté par e-Tirmidhî (320), e-Nasâî (2043), Abû Dâwûd (3236) et Ahmed (1/337), selon ibn ‘Abbâs.

[14] Rapporté par Abû Dâwûd (2042) et Ahmed (2/367), selon Abû Huraïra (t).

[15] Luqmân ; 25

[16] Les croyants ; 84-89

[17] Yûsaf ; 106

[18] Jâmi’ el masâil (3/145-151).
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