ÚÑÖ ãÔÇÑßÉ æÇÍÏÉ
  #8  
ÞÏíã 23 Sep 2012, 07:59 AM
ßÑíã ÒäÊíÓí
ÒÇÆÑ
 
ÇáãÔÇÑßÇÊ: n/a
ÇÝÊÑÇÖí








Le mawlid

Toutes ces raisons suggérées nous incitent à nous pencher sérieusement sur la vie du Prophète (r). Il ne s’agit pas de le faire un seul jour ou en réaction aux attaques qu’il a subites. Nous ne devons pas être ainsi ! Consacrer un seul jour pour rendre hommage à Mohammed (r) ! Un jour que les gens sont susceptibles d’accompagner de futilités, de balivernes, et des œuvres que lui-même (r) n’aime certainement pas ! Il n’est pas pertinent de faire des choses qu’il (r) n’aime pas ! À ceux qui disaient : « Tu es notre maître et le fils de notre maître », ce dernier (r) répondit : « Ne m’élevez pas en éloge comme l’ont fait les chrétiens envers ‘Isâ le fils de Mariam ; je suis simplement le serviteur d’Allah et Son Messager, alors dites : le serviteur d’Allah et Son Messager. »[1]

Pourtant, il est bel et bien notre maître, il est même le maître des fils d’Adam. Malgré cela, il a craint que Satan fasse sortir certains gens des limites tolérées pour les entrainer dans les domaines interdits. Pour protéger le domaine de l’Unicité et pour parer à tout moyen menant à l’association, il leur a interdit de faire des éloges à outrance qui sortent des limites tolérées.

Non seulement certains musulmans se préoccupent de Mohammed (r) juste une seule nuit, mais ils y font des choses que lui-même ne tolère pas. Il ne l’a d’ailleurs jamais fait vivre ni lui ni ses Compagnons, qui sont pourtant les hommes les plus aimés à ses yeux et il est l’homme le plus aimé aux leurs. Ils ne l’ont jamais fait vivre (y) ; ceux-là mêmes qui l’accompagnaient dans ses guerres et qui l’aimaient à tel point qu’ils le préféraient à eux-mêmes. Pourtant, ils n’ont jamais consacré de pratiques comme celles qui ont lieu durant certaines périodes et qui n’ont pas été légiféré.

(Ont-ils des associés qui leur légifèrent de la religion, ce qu’Allah ne leur a pas autorisé).[2] Autrement dit, nous devons suivre Mohammed, car Allah (I) nous l’a ordonné à travers les Versets : (Dis : si vous aimez vraiment Allah alors suivez-moi donc ; Allah vous aimera),[3] (et ne suivez pas les sentiers qui vous disperseront de son chemin),[4] (Dis : voici mon chemin sur lequel j’appelle à Allah).[5]

Son chemin (r) est clair ; il ne permet pas que l’on innove dans la religion, comme le mentionne le hadîth : « toute chose innovée dans nos enseignements sera refusée. »[6] Quand il parle de « nos enseignements », il fait allusion à des choses qui sont connues et notoires. Le Verset suivant donne encore plus de précision dessus : (Aujourd’hui, Je vous ai parachevé votre religion, Je vous ai parfait de Mes bienfaits et Je vous ai agréé l’Islam comme religion).[7] La religion a été parachevée et elle est complète. Après la mort de Mohammed (r), il n’y a plus de révélation. Si la révélation s’est interrompue, qui peut bien avoir légiféré ce rituel que l’on voue à Allah alors que Son Messager (r) ne l’a pas fait. Ce rituel a donc été ajouté à la religion qui semblerait inachevée.

L’amour légitime du Prophète (r)

L’amour légiféré par la Révélation est celui qui permet de se rapprocher d’Allah (I) et qui nous met en valeur. Notre réaction face à la campagne de caricatures ne doit pas être mue par les émotions. Faut-il s’enflammer à chaque nouvel événement et se détourner dès que tout est fini ? Ce genre d’attitude ne peut nous mettre en valeur et ne peut répondre à cette ambition ! Si encore cette ambition était une fin en soi, mais il incombe plutôt à tout musulman d’avoir comme préoccupation dans sa vie de rechercher comment vivait Mohammed (r) afin de mettre ses ordres en pratique et de s’éloigner de ses interdictions comme Allah nous l’a ordonné en disant : (Les enseignements que le Messager vous a donnés, prenez-les et ce qu’il vous a interdit, renoncez-y).[8] C’est cet objectif, ô combien important, que nous devons avoir en étudiant la sîra. Il s’agit de suivre et de se conformer à la voie prophétique dans l’espoir d’obtenir l’Agrément d’Allah.
Le début de la période médinoise

Après cet exposé, nous pouvons passer au sujet. Il s’agit de la période médinoise. Quand nous parlons de période médinoise, c’est pour faire la distinction avec la période mecquoise. Sheïkh Sâlih el Fawzân s’est chargé de brosser le tableau de cette époque au cours de sa conférence. Celle-ci relate les événements de la vie du Prophète (r) lorsqu’il se trouvait dans sa ville natale, La Mecque.

À l’époque où la répression des païens quraïshites contre le Messager (r) et ses Compagnons s’amplifia, un groupe de voyageur venant de Yathrîb (l’ancien nom de Médine) se rendit aux Lieux saints pour le pèlerinage. Les futurs ansârs rencontrèrent le Prophète (r) qui leur exposa l’Islam. Les six membres du groupe se rangèrent à son discours. Notons que le premier enseignement qu’il (r) leur exposa était qu’il devait renoncer au paganisme. Ils devaient également renoncer au vol, à l’adultère, etc.[9]

Ainsi, avec la lumière de la foi et de la vérité imprégnée dans le cœur, ce groupe d’hommes rentra chez lui. Sur place, ils propagèrent leur nouvelle religion aux habitants de Yathrib. Le nombre de convertis augmentait jour après jour. Cette allégeance qui eut lieu avec le Prophète prit le nom de bî’a el ‘aqaba el ûlâ.

L’allégeance de bî’a el ‘aqaba et les événements précurseurs à l’émigration

L’année suivante, le Prophète (r) entra en contact avec une autre caravane venant de Médine, et dont le nombre était passé à douze. Ils écoutèrent attentivement son discours et ramenèrent avec eux Mus’ab ibn ‘Umaïr à qui le Prophète (r) avait chargé de leur enseigner la religion et le Coran. il est donc légitimé d’envoyer des prédicateurs dans le but d’orienter les gens vers la vérité et de leur apprendre le Coran ; ce Livre qui renferme des histoires qui regorgent de leçons.

La rencontre suivante fut l’occasion d’une deuxième allégeance, bî’a el ‘aqaba e-thâniya. Une caravane était venue pour la saison du hadj et ses membres s’étaient donnés rendez-vous avec le Prophète (r) à Mina. Ils s’entretinrent avec lui et lui offrirent de s’installer chez eux. L’idée avait germé à Médine qui jouissait de la sécurité et de l’opulence. En émigrant chez eux, le Messager (r) n’aurait plus à endurer la persécution de ses concitoyens. Ils lui firent cette proposition en présence de son oncle el ‘Abbâs qui était là pour s’assurer de leur loyauté et qu’ils avaient vraiment les moyens de remplir leurs promesses. Il prit leur engagement d’offrir refuge à son neveu et d’assurer sa sécurité.

La caravane était constituée de soixante-dix hommes accompagnés de deux femmes. Tout le groupe fit allégeance au Prophète (r) de se soumettre à son obéissance dans la joie et dans la peine, de subvenir à ses besoins, de le protéger comme leurs femmes et leurs enfants, etc.[10] L’émigration (hijra) fut organisée. C’est à cette période que le Prophète (r) autorisa à certains de ses Compagnons de prendre la route de Médine, alors que lui resta sur place.
Notons qu’à l’occasion de cette deuxième allégeance, l’un des ansârs demanda au Prophète : « Messager d’Allah ! Fonçons sur les païens à Mina et passons-les au fil de l’épée.
  • Non, répondit-il, nous n’avons pas reçu cet ordre ! »
Il attira leur attention ainsi sur un principe d’une grande importance. Autrement dit, il ne faut pas se laisser guider par les sentiments et les émotions, mais il faut se soumettre aux Ordres d’Allah. D’où sa fameuse réponse : « nous n’avons pas reçu cet ordre ! »

‘Abd e-Rahmân ibn ‘Awf lui-même avait suggéré auparavant ce genre de chose en disant : « Nous étions à l’époque païenne, forts et puissants, et nous maitrisions l’art de la guerre, alors pourquoi, devenus musulmans, devrions-nous connaitre l’avilissement ? » Cependant, il reçut la même réponse : « nous n’avons pas reçu cet ordre ! »

La voie prophétique nous apprend ainsi qu’il incombe de s’arrêter aux commandements et de ne pas se laisser prendre par les sentiments qui engendrent souvent des décisions aux conséquences fâcheuses. Le Prophète (r) cherchait à éduquer ses Compagnons et à leur inculquer d’être fidèles à la religion, sans rien innover. Ils devaient considérer les événements à la lumière des commandements (obligations/interdictions) d’Allah et de Son Messager. Cette démarche implique de ne pas laisser libre court à ses émotions impulsives.

•••

Le Prophète émigra en compagnie d’Abû Bakr e-Siddîq (t) dont les mérites ne sont plus à vanter auprès des musulmans. Ce dernier tient une grande place dans le cœur du Messager d’Allah (r), et de sa communauté fidèle à sa voie. Pourrait-il en être autrement, alors qu’Allah la choisit comme ami et compagnon de route à Son Prophète (r) en partance pour Médine.

La hijra occupe une place importante dans l’Histoire musulmane. Elle se situe à une étape charnière au cours de laquelle la situation des musulmans s’est débloquée, et notamment celle du Prophète (r). Celle-ci marque le début de notre calendrier qui fut institué à l’initiative du deuxième khalife. Ce dernier avait reçu un document officiel dans lequel son auteur, qui serait selon les dires Abû Mûsâ el Ash’arî, réclamait : « Les écrits que nous t’envoyons, comment peut-on les dater ? » ‘Omar (t) décida alors de réunir une cellule de concertation composée des Compagnons. La question était de savoir quel serait le point de départ du nouveau calendrier.

Selon une autre hypothèse, on lui présenta un document officiel faisant état des dettes de sha’bân : « lequel sha’bân, s’interrogea el farûq, celui de cette année, de l’année dernière ou de l’année prochaine ? » Plusieurs propositions lui furent soulevées de la part des Compagnons présents dans son assemblée. On pensa à la naissance du Prophète (r) et même à son avènement, mais une troisième proposition allait recevoir le consentement du successeur d’Abû Bakr, d’Uthmân ibn ‘Affân, et d’Alî ibn Abî Tâlib. Il s’agissait de la hijra du Prophète (r). Avant cela, d’autres propositions avaient été avancées : se conformer au calendrier romain ou perse. Cependant, celles-ci n’eurent aucun succès.

L’émigration fut retenue comme point de départ du nouveau calendrier. La raison, c’est qu’elle se situe à une étape charnière dans l’Histoire des premiers musulmans qui étaient opprimés à La Mecque. Après leur départ à Médine, leur situation changea complètement. Ils jouissaient désormais d’un État fort et puissant. Cet exil, qui préparait l’émersion d’un empire, était tout désigné pour devenir le point de départ du calendrier musulman.

Selon une troisième hypothèse, cette décision fut inspirée du Verset : [une mosquée fondée sur la piété depuis le premier jour].[11] Le premier jour en question serait celui où le Prophète (r) arriva à Médine à la suite de son émigration.

Il restait de savoir quel mois marquerait le début de l’année hégirienne ? Le ramadhan fut proposé, mais aussi rabî’, et rajab. ‘Omar préféra muharram. Son avis rejoignait celui d’autres Compagnons de l’assemblée.
Une autre explication nous fait savoir que la réunion au cours de laquelle le groupe d’ansârs proposa au Prophète (r) de l’accueillir sur leur territoire, eut lieu en dhû el hijja. La prochaine lune qui suivit cette décision annonçait muharram. Dans son recueil e-sahîh, el Bukhârî a choisi pour titre à l’un de ses chapitres : chapitre : le calendrier et comment fut-il institué ? Sous ce chapitre, il rapporte la parole de Sahl ibn Sa’d disant : « On n’a pas utilisé pour le calendrier l’avènement du Prophète (r) ni le jour de sa mort, mais le jour qui fut retenu c’est celui de son arrivé à Médine. »[12]

Tel fut donc le début du calendrier. Celui-ci nous apprend que la hijra occupe une place énorme dans le cœur des musulmans. Les Compagnons du Messager d’Allah (r) en avaient conscience, c’est pourquoi, ils la choisirent comme point de départ de leur calendrier. Cependant, ils ne lui consacrèrent jamais de fête ni d’innovation. Ils étaient plutôt fidèles à la sunna qu’ils n’allaient pas transformer. Ils se contentèrent de faire de la hijra la référence pour leurs dates. Elle n’a jamais été à leur époque, l’occasion de lire des vers et de consacrer des chants religieux ou tout autre action que ni le Messager d’Allah (r) ni ses Compagnons (y) n’avaient jamais faite.

Or, le Prophète nous dit bien : « Accrochez-vous à ma tradition et à celle des khalifes bien guidés après moi ; prenez-la avec les molaires ! »[13] Il nous a donc imposé de suivre la tradition des Khalifes, et c’est ce que nous avons fait. Nous n’avons rien inventé ! Le calendrier hégirien fut institué sous l’ère du khalifat.

L’arrivée à Médine

Dès son arrivée à Médine, le Prophète (r) s’arrêta chez les banû ‘Awf à Qubâ où il séjourna quatre jours ; période durant laquelle il posa les fondations de la mosquée de Qubâ. Ensuite, il se dirigea à Médine. C’était un vendredi. À l’heure du zhurh, il parvint chez les banû Sâlim ibn ‘Awf, où il fit halte pour effectuer à leur tête la prière du vendredi (jumu’a), la première que l’Islam a connue. Puis, il continua son chemin. Son entrée dans la ville fut accueillie avec une grande joie. La foule avait entouré le premier homme de l’Islam. Un Juif, qui était venu pour l’occasion s’exclama : « Celui qui vous fut annoncé, et qui sera à l’origine de votre puissance et de votre honneur est arrivé. »

Lorsque les muhâjirîns et les ansârs entendirent ces paroles (y), ils redoublèrent de joie et s’agglutinèrent autour du Prophète (r) ; chacun espérait être l’heureux élu qui l’inviterait chez lui. Pour sa part, il se contentait de dire, comme le spécifient certaines versions : « Laissez-la [en parlant de sa chamelle ndt.], elle agit selon des ordres. »[14]

Une autre version parle d’Abû Ayyûb (t), qui aurait pris les affaires du Prophète (r) pour les mettre chez lui. Cette précaution valut que le Prophète (r) déclinait toutes les invitations qu’il recevait sur son passage, sous le motif que : « L’homme suit ses bagages ! »[15] Il usait de cette délicatesse et de ce tact pour ne pas froisser ses Compagnons.

Il s’installa donc chez Abû Ayyûb el Ansârî (t) qui se sentait gêner de prendre l’étage. L’idée de se retrouver au-dessus du meilleur des hommes le tracassait. Il lui fit d’ailleurs savoir en ces termes : « Messager d’Allah ! Toi, viens habiter à l’étape, et ma famille et moi, nous habiterons en dessous.
  • Le rez-de-chaussée est plus agréable, répondit-il.
  • Je ne peux pas marcher sur un plancher qui se trouve au-dessus de ta tête, justifia Abû Ayyûb (t). »
C’est alors que l’invité (r) s’installa à l’étage.[16] Lui, qui avait la vertu de faire les choses sans qu’aucun préjudice ne retombe sur son hôte. Il avait compris qu’il leur était pénible de le savoir en dessous d’eux. Ils étaient tellement scrupuleux que dès qu’un peu d’eau tombait d’une outre, ils s’empressaient de le nettoyer de peur qu’il n’atteigne l’homme à qui ils tenaient comme la prunelle de leurs yeux (r).

Ce voisinage dura quatre mois. Avant même de penser à avoir un toit, alors qu’il était à la tête de toute une communauté, le Prophète (r) attaqua la construction de la mosquée. C’était la première activité à laquelle il participa de ses mains. Elle se situait à l’emplacement même où sa chamelle s’était assise. Il le fit aussitôt savoir en disant : « C’est ici que nous descendons, in shâ Allah ! »[17] La parcelle de terre appartenait à deux orphelins de la ville. Il passa la période des fondations chez Abû Ayyûb (t), puis, il se fit monter des appartements qui allaient accueillir ses épouses. Les murs étaient faits de briques et d’argiles, et des branches de palmiers servaient de toit.

Un abri aussi élémentaire était destiné au Messager d’Allah (r), qui préférait les délices qui se trouvaient auprès de Son Seigneur au confort d’ici-bas. Il n’était pas porté vers les jouissances terrestres, bien qu’il se contentait d’en prendre juste ce qu’il fallait. Il n’oubliait pas la part de ce monde qui lui était réservée. Il était le plus ascète et le plus pieux des hommes. Pourtant, il mangeait de la viande et sa tenue vestimentaire était conforme à ses besoins. Il était heureux de voir un homme bien habillé, et disait à ce sujet : « Allah est beau et aime ce qui est beau. »[18] Il préconisa même à Samura ibn Fâtik (t) : « Quel heureux homme, s’il prenait ses cheveux. »[19] En voulant dire qu’il devait se coiffer.

Les lignes précédentes nous apprennent que, notre intérêt pour ce bas monde doit être porté sur des choses que l’on retrouvera dans l’au-delà. Cet intérêt ne doit pas se faire toutefois au détriment de notre devenir. En parallèle, nous ne devons pas oublier notre part de ce monde qui nous en est réservée, et qui tourne autour des bienfaits qu’Allah nous a rendus licites. Le Très-Haut révèle à ce sujet : [Dis : qui a interdit les beautés qu’Allah a accordées à Ses créatures et les bonnes choses qu’Allah leur a pourvues],[20] [Ô fils d’Adam ! Faites-vous beaux avant de vous rendre à chaque prière].[21]

Or, pencher vers les beautés de ce bas monde au détriment de l’au-delà conduit indubitablement au malheur, qu’Allah nous préserve et qu’Il nous protège tous autant que nous sommes !

•••

Le Prophète (r) s’installa donc à Médine où il s’entoura des muhâjrîns et des ansârs. Dans ce climat, les hypocrites firent leur éclosion. Ce phénomène n’existait pas à La Mecque. Une autre catégorie d’individus composa la société médinoise, les Juifs. Comment le Prophète (r) allait-il régner sur une population aussi hétérogène, et qui ne comptait pas que des alliés ?

El muakhât entre les muhâjrîns et les ansârs

La première action du Prophète (r) fut d’établir un lien fraternel (el muakhât) entre les émigrés mecquois et les auxiliaires médinois qui formaient le groupe des Compagnons. Les muhâjrîns (y) avaient quitté leurs familles, leurs biens, et leur terre natale pour fuir la répression quraïshites. La pauvreté qui les atteignait avait vraiment affecté les rangs, en plus du fait qu’ils étaient confrontés à un nouvel environnement. La fièvre (malaria ndt.) qui hantait les lieux n’arrangeait pas les choses. Pour alléger leur douleur, le Prophète (r) prit l’initiative de renforcer les liens fraternels qui les liaient avec ceux qui les avaient accueillis. C’était la fameuse muakhât. Elle n’avait pas uniquement pour but de consoler les muhâjirîns, mais c’était aussi le moyen d’unir les cœurs de cette collectivité naissante.

Au début, la muakhât permettait aux nouveaux frères d’hériter entre eux, ce qui facilita l’adaptation des réfugiés se sentant moins mal à l’aise dans leur nouvel univers. Cette fraternité que le Prophète (r) avait mis en place était motivée par l’amour en Dieu. Rien ne se cachait derrière : ni intérêt matériel ni esprit tribal ou partisan ni lien de sang. Cet amour en Dieu qui était à même de créer un climat d’entente et d’union entre les adeptes de la religion naissance. Les ansârs étaient des citoyens exemplaires. Le Coran au même titre que le Prophète (r) vante leur esprit de sacrifice. Ces derniers allèrent jusqu’à partager leurs richesses en deux avec les nouveaux arrivants.
Ils le firent savoir à leur chef en ces termes : « Messager d’Allah, donne à nos frères muhâjirîns la moitié de nos richesses. » Proposition que ce dernier refusa. Ils avaient malgré tout une alternative : « Alors, qu’ils nous donnent un coup de main dans notre travail, et nous pourrons ainsi leur offrir une part des profits. » Ils se mirent d’accord sur la chose, ce qui dénote les effets surprenants que suscita en eux cette fraternité.

Le Messager d’Allah (r) avait fraternisé entre ‘Abd e-Rahmân ibn ‘Awf (muhâjirî) et Sa’d ibn Rabî’ (ansârî). Lien qui inspira les paroles de Sa’d : « Je te donne la moitié de mes richesses et je te t’offre une épouse.
  • Qu’Allah bénisse ta richesse et tes épouses, répondit son nouveau frère, mais montre-moi où est le sûk ? »
À son retour, il avait récolté de l’aqit (lait séché ndt.) et du saman (beurre fondu ndt.). Par la suite, il rencontra le Prophète (r) qui avait remarqué son parfum. Il justifia qu’il s’était uni à une femme ansâr. En peu de temps, il s’était marié et avait trouvé un gîte.
Le Prophète (r) lui demanda : « Quelle dote as-tu avancée ?
  • Le poids d’un noyau de datte en or.
  • Consacre une walîma (repas de noces ndt.), ne serait-ce qu’avec un seul mouton, lui suggéra-t-il. »[22]
La situation des muhâjirîns s’améliora, très vite, considérablement grâce à Dieu, et sans que cela ne porta préjudices à ceux qui les avaient accueillis.

Les relations avec les hypocrites

L’une des initiatives que le Prophète (r) prit à son arrivé à Médine touche les hypocrites. Ceux-là mêmes qui faisaient du mal aux croyants et qui leur proféraient des paroles blessantes. Le Prophète plus particulièrement était leur cible. Ils ne manquaient pas de l’égratigner en assenant qu’il écoutait tout ce qu’on lui disait. Ibn Salûl alla jusqu’à menacer que les forts allaient sortir les faibles de Médine, etc. Leurs moqueries et leurs insultes et même leurs gestes heurtaient véritablement les musulmans.

Or, le Prophète (r) laissa-t-il monter les tensions qui susciteraient la haine et la discorde au milieu des médinois, au lieu de sauvegarder un climat de bonne entente et d’affection ? Malgré les mauvaises herbes insérées dans les rangs, il coupa court à toute tentative de division. La sagesse était de rigueur. Il devait à la fois contrer les attaques et faire en sorte qu’elles ne laissent pas de traces profondes au sein de la communauté musulmane.

Il était relativement souple quand ses détracteurs faisaient mines de regretter leurs paroles et qu’ils lui avançaient des excuses. Dotés d’une langue bien fourchue, ils ne se gênaient pas pour justifier que leurs intentions n’étaient pas mauvaises.

‘Abd Allah ibn Ubaï ibn Salûl notamment était l’instigateur de la campagne de calomnie lancée contre ‘Âisha ? Pourtant, le Prophète (r) le fit-il fouetté ? Lui fut-il appliqué la peine qu’il méritait, et qui permet aux adeptes de l’Islam de se laver de leurs fautes ? Le fait est que ce dernier n’était pas musulman. L’hypocrite est condamné au dernier degré de l’Enfer. À quoi bon lui appliquer les peines qui ne peuvent lui être utiles !
Le Prophète (r) tout au plus monta sur sa chaire pour déclarer : « Qui peut m’en vouloir de punir un homme qui m’a fait du mal, et qui, selon ce qu’on m’a rapporté, a porté atteinte à ma famille ? » Dès lors, Sa’d ibn Mu’âdh (t) se leva pour s’exclamer : « Moi, Messager d’Allah, je m’en charge ! S’il compte parmi les Aws, je me chargerais personnellement de lui trancher la nuque. Et s’il compte dans les rangs de nos frères, les khazraj, nous nous en tiendrons à ta décision. » Sa’d ibn ‘Ubâda qui faisait partie du clan d’ibn Salûl, se leva à son tour pour s’écrier : « Tu mens, par Allah, tu ne lui feras rien ! S’il avait été des tiens, tu n’aurais pas voulu qu’on le tue. » La tension monta entre les deux tribus et faillirent en arriver aux mains devant les yeux du Prophète (r) qui, du haut de son minbar, réussit à ramener le calme.[23]

Le Prophète (r) avait conscience de l’ampleur que prenait la tournure des événements. Il descendit de sa chaire, mais ne chercha pas à incriminer Sa’d ibn ‘Ubâda. En tant que chef, il devait appréhender les choses avec délicatesse. Le but était de trouver une issue favorable. Ce n’était pas l’endroit pour donner raison aux uns et donner torts aux autres. Il fallait arranger les choses. En fin de compte, la Révélation intervint dans cette affaire dont les détails sont recensés dans les recueils de hadîth.

Nous pouvons en déduire que tout prêcheur qui veut arranger une histoire entre ses frères doit prendre le Prophète (r) en exemple. Il doit procéder de la même façon que lui en pareille situation. Certains conciliateurs ont la maladresse de montrer du doigt l’une des parties en présence. Qui va accepter de se réconcilier avec une telle méthode ? Si l’on veut arranger une histoire, il faut dans un premier temps mener les parties concernées sur un terrain d’entente. Ensuite, il faut veiller à concilier les cœurs. Voici la bonne démarche à suivre.

Ainsi, le Prophète (r) parvint à contenir les hypocrites. Il ne leur laissa pas la chance de mettre à exécution leur complot qui se cachait derrière l’affaire de la diffamation de l’une de ses femmes.

Cependant, ces derniers ne baissèrent pas les bras, dans leur combat qu’ils menèrent contre Allah et Son Messager. Ils firent construire une mosquée qui viendrait rivaliser avec celle de Médine et d’où ils pourraient attaquer tranquillement le Messager d’Allah (r) et ses Compagnons. Pour lui donner un air de légitimité, ils l’invitèrent à prier dans ses murs. Allah l’épargna de sombrer dans leur piège, en lui dévoilant leurs réelles intentions. C'est pourquoi il refusa leur invitation.[24]

Tous ces événements posent le doigt sur la manière dont le Prophète (r) abordait les problèmes. Il n’était pas partisan des réactions impulsives et hâtives comme ce fut le cas le jour où ‘Omar (t), voulaient en venir à l’épée. Le mot d’ordre était clair : « Il ne faut pas donner l’occasion de dire que Mohammed tue ses Compagnons ! »[25]

Les gens ne jugent en effet que sur les apparences. Les hypocrites se réclamaient musulmans et ils priaient dans les mêmes rangs que les Compagnons. Le Prophète (r) pesait entre le pour et le contre avant de prendre des décisions et d’agir. S’il les avait tué, on aurait pensé qu’il s’en était pris à ses propres Compagnons et il aurait ainsi fait fuir les gens de la religion.

Le prêcheur doit absolument tenir compte de ce point lorsqu’il est confronté à ce genre de situations qui se ressemblent beaucoup d’une époque à une autre ; il doit peser les avantages et les inconvénients.

A la mort du Prophète (r), les noms des hypocrites étaient secrètement connus par son confident Hudhaïfa ibn el Yamân (t). Ce fameux confident ne les divulgua pas à Abû Bakr qui était pourtant le premier Khalife ; il ne les divulgua pas non plus à ‘Omar ni à ‘Uthmân ni à ‘Alî (y).

Dans ces relations avec les hypocrites, le meilleur des hommes gardait toujours en vue l’intérêt général de la communauté. Les Compagnons et les générations tirèrent profit de ces enseignements et suivirent son modèle. Il ne nous reste plus qu’à prendre exemple sur nos ancêtres !

J’implore le Pardon d’Allah et me repens à Lui ! Je salut et je prie sur Mohammed ibn ‘Abd Allah, ainsi que sur ses proches et tous ses Compagnons !



[1] Rapporté par el Bukhârî (3445), selon ‘Omar ibn el Khattâb (t).

[2] La concertation ; 21

[3] La famille d’Imrân ; 31

[4] Le bétail ; 153

[5] Yûsaf ; 108

[6] Rapporté par el Bukhârî (2697) et Muslim (1718), selon ‘Âisha – qu’Allah l’agrée –.

[7] Le repas céleste ; 3

[8] Le rassemblement ; 7

[9] Voir : le hadîth rapporté sur le sujet par el Bukhârî (18) et Muslim (1709), selon ‘Ubâda ibn e-Sâmit (t).

[10] L’histoire de la deuxième allégeance est rapporté par Ahmed dans son recueil el musnad (15798), selon Ka’b ibn Mâlik (t).

[11] Le repentir ; 108

[12] Voir : sahîh el Bukhârî (3934).

[13] Rapporté par Ahmed (17142), ibn Mâja (42), e-Tirmidhî (2676), selon el ‘Irbâdh ibn Sâriya (t).

[14] Voir : e-sîra e-nabawiya d’ibn Hishâm (3/22).

[15] Voir : l’énoncé intégrale de cette histoire comme l’a rapporté ibn Jarîr e-Tabarî dans son târîkh (2/8), selon ibn Ishâq et d’autres.

[16] Rapporté par Muslim (2053), selon Abû Ayyûb (t).

[17] Rapporté par el Bukhârî (3906), selon ‘Âisha – qu’Allah l’agrée –.

[18] Rapporté par Muslim (91), selon ibn Mas’ûd (t).

[19] Rapporté par Ahmed (17788), selon Samura ibn Fâtik (t).

[20] El A’râf ; 32

[21] El A’râf ; 31

[22] Rapporté par el Bukhârî (2049) et Muslim (1428), selon Anas (t).

[23] Voir pour l’affaire de la calomnie : el Bukhârî (4141) et Muslim (2770), selon ‘Âisha – qu’Allah l’agrée –.

[24] Voir pour cet épisode : tafsîr ibn Jarîr e-Tabarî (6/469-470) et tafsîr ibn Kathîr (2/510).

[25] Rapporté par el Bukhârî (3518) et Muslim (2584), selon Jâbir ibn ‘Abd Allah – qu’Allah les agrée son père et lui –.





ÑÏ ãÚ ÇÞÊÈÇÓ