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ÞÏíã 29 Jan 2015, 02:35 PM
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ÇÝÊÑÇÖí L’origine et l’évolution sémantique de l’expression shart kamâl

L’origine et l’évolution sémantique de l’expression shart kamâl
(Partie 1)


L’Imâm Harb ibn Ismâ’îl dit dans ses masâil (p. 366) : « Quant aux kharijites, ils taxent les traditionalistes de murjites. Ils mentent ! Ce sont eux les murjites, car ils prétendent être les seuls à avoir la foi, et ils vouent à la mécréance tous ceux qui ne pensent pas comme eux. »


Sheïkh el ‘Uthaïmîn pensait que l’une des raisons qui ont poussé certains à remettre en question l’intégrité de Sheïkh el Albânî, est le sentiment de jalousie qu’il a suscité à cause du succès immense dont il a jouit notamment et pas seulement, dans les milieux savants. Cette réaction était caractéristique aux hypocrites de la première époque qui prenaient les croyants en dérision. Sheïkh Mohammed va plus loin en disant que l’accusation d’irja dont fut l’objet Sheïkh sir est mue par les mêmes qui ne tolèrent aucune contradiction à leurs points de vue dans le domaine du takfîr. Tous ceux qui s’opposent à leurs conclusions sont automatiquement taxés de murjites. Le Sheïkh en conclut qu’il ne faut pas prêter l’oreille à ce genre d’accusation d’où qu’elle puisse venir.[1]


D’après un hadith rapporté par l’Imam Ahmed, le Prophète (r) a dit : « Le Jour de la Résurrection, Allah (I) envoie un ange pour protéger des flammes de l’Enfer, quiconque défend un croyant sur terre contre la mauvaise langue d’un hypocrite. Allah (I) retient sur le Pont jeté au-dessus de la Géhenne quiconque accuse le croyant d’une chose dans l’intention de l’injurier, jusqu’à ce qu’il revienne sur ses paroles. »[2]


Louange à Allah le Seigneur de l’Univers ! Que les Prières et le Salut d’Allah soient sur notre Prophète Mohammed, ainsi que sur ses proches et tous ses Compagnons !

Énigme


Zhâhirat el irjâ fî el fikr el islâmî est une thèse universitaire ès Doctorat de Safar el Hawâlî. Encadrée par l’incontournable Mohammed Qutb, elle parachève le projet initiée en Magistère avec el ‘almâniya, et qui ébranle à la base la légitimité de l’autre pilier qui garantit la stabilité des sociétés, les émirs. La seconde thèse se chargea des savants. Le directeur de recherche et frère du « martyr » avait tapé droit dans le mille. Il ne lui restait plus qu’à récolter les fruits de son labeur en ayant distillé les ingrédients à même de déstabiliser la société saoudienne, mais aussi toute la région, voire tout le monde musulman. Les graines du changement avaient été semées bien avant par le biais notamment de Saïd Qutb et d’el Mawdûdî. Ce sont les mêmes ingrédients qui ont renversé l’autorité en place sous l’Ancien Régime : la monarchie (les émirs) et le clergé (les savants).
Ainsi, les sources révolutionnaires des mouvements progressistes islamiques sont plus à chercher du côté de Rousseau, Voltaire, et Mirabeau, l’héraut de la Révolution, que des textes scripturaires de l’Islam, même si les hérésies subversives se sont très tôt ancrées dans le patrimoine musulman.


Bref, le D. Safar ouvrit son nouveau front avec l’arme du « shart kamâl ». Loin de s’encombrer de détails, il avait trouvé la faille. L’expression est emprunté aux ash’arites qui eux, sont des mutakkalimins, et donc des murjites. Résultat binaire (même si j’extrapole un peu, mais pas trop) : tous ceux qui reprennent l’expression à leur compte, en commençant par ibn Hajar, avec l’Albani pour la cerise sur le gâteau sont à mettre dans le même sac. Tous les chercheurs ou presque qui, par la suite, ont écrit sur le sujet reprennent les travaux de notre Docteur, à tel point, qu’aux yeux de beaucoup, leur conclusion, qui s’est étendue aux rangs des traditionalistes, relève du fait établi et indiscutable jetant aux gémonies et à la vindicte populaire tout contrevenant téméraire ! Qu’en est-il réellement ? C’est ce dont se charge cet article qui sera organisé en forme de points :


1- Je ne connais pas l’origine des expressions shart kamâl/ shart sihha, pour reprendre les termes de Sheïkh Râjihî, indépendamment de savoir ce qu’il pense sur la question, et, à ma connaissance, elles ne proviennent à l’origine ni des traditionalistes ni des murjites.[3] Aucun hérésiographe, en effet, ne recense une tendance murjite qui dirait que les actes sont shart kamâl dans la définition de la foi. Aucune annale ne rapporte qu’un ancien aurait fustigé cette tendance. Ibn Taïmiya, dont les écrits n’ont aucun équivalent dans la réfutation aux hérétiques et notamment aux murjites, n’a jamais soulevé ce point, du moins dans ses écrits qui nous sont parvenus aujourd’hui, et qui sont disponibles au public. Personne d’autre que lui n’a une expérience aussi poussée de la tendance orthodoxe qui était en vogue chez les prédécesseurs, mais aussi des sectes égarées. Ni le fondateur éponyme de la secte ash’arite ni les paléo ni les néo ash’arites n’ont jamais eu recours à ce vocabulaire pour parler de la foi. Nous pouvons compter dans cet ensemble, les théoriciens Abû Bakr el Bâqillânî (m. 403 h.), el Juwaïnî (m. 478 h.), el Ghazâlî (m. 505 h.), et ibn el Khatîb e-Râzî (m. 606 h.). Les murjites toutes tendance confondues disent que les actes extérieurs ne font pas partie de la foi, sauf que pour certains, ils en font partie majâzan (de façon métaphorique), étant donné qu’ils en sont les fruits et les effets (thamara el îmân wa muqtadhâhu) ; ils prétendent également qu’il est possible d’avoir une foi parfaite sans ne fournir aucun acte extérieur.[4]


Si cela est clair, quand Safar el Hawâlî veut démontrer que shart kamâl provient des murjites, il ne fait que citer des commentateurs ash’arites modernes et des théologiens du kalâm qui sont tous venus longtemps après ibn Taïmiya, notamment :
  • Ibrâhîm e-Luqânî (m. 1041 h.).
  • Son fils Badr e-Salâm (m. 1078 h.).
  • Ahmed el Mâlikî e-Sâwî (m. 1041 h.).
  • ‘Alî el ‘Adawî (m. 1189 h.).
  • El Bâjûrî (m. 1276 h.).


2- Sheïkh ‘Abd e-Rahmân el Barrâk souligne que cette question prend ses racines chez certains savants des générations récentes, comme le souligne el Hâfizh ibn Hajar avec des explications qu’il a peut-être empruntées à un autre auteur.[5] L’Imâm Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb va plus loin en affirmant qu’ibn Hajar (m. 852 h.). relate la tendance des modernes, soit des mutakallimîns néo-ash’arites.[6] Son petit-fils ‘Abd e-Rahmân ibn Hasan souligne que l’imâm a réfuté les erreurs de fath el Bârî dans le domaine de la foi.[7] Ainsi, nous avons plus de précision sur la période probable de l’origine de shart kamâl pour parler de la place des actes dans la définition de la foi ; soit, entre la mort d’ibn Taïmiya (m. 728 h.) –ou un peu avant ou un peu après – et celle d’ibn Hajar, soit dans une fourchette entre le 7ième et le 9ième siècle.


3- Or, des études récentes montrent qu’ibn Hajar s’alignait dans le domaine de la foi avec le crédo traditionaliste,[8] même s’il emprunte l’expression shart kamâl aux mutakallimîns dont il ne fait pas partie. Il fut certes influencé par les spécialistes du kalâm, mais il était avant tout un traditionniste (spécialiste en hadîth non en kalâm).


Les catégories de savants ayant été influencées par le kalâm


Ibn Taïmiya établit que les négateurs, toutes tendances confondues, n’ont pas tous le même niveau de connaissance. Ce dernier les classe en plusieurs catégories :


Primo : certains n’ont pas une grande expérience des questions rationnelles, et se contentent de prendre pour argent comptant les idées qu’on leur distille, et qu’ils voient comme des preuves incontestables. Ils n’ont pas cette autonomie intellectuelle qui leur ferait avoir du recul par rapport à ces questions. En réalité, ils sont de simples suiveurs, malgré leur bagage, et n’ont pas la capacité d’utiliser à bon escient les textes du Coran, de la sunna et des paroles des anciens allant à l’encontre de leur crédo. Ils pensent qu’ils vont dans le même sens, et quand ils leur posent problèmes, ils s’en détournent purement et simplement, en remettant leur sens au Très-Haut, par le biais du tafwîdh.


Dans cette catégorie, nous avons : Abû Hâtim el Bustî (m. 354 h.), le mu’tazilite Abû Sa’d e-Sammân (m. 445 h.), Abû Dharr el Harawî (m. 434, 435 h.), Abû Bakr el Baïhaqî (m. 458 h.), el Qâdhî ‘Iyâdh (m. 544 h.), Abû el Faraj ibn el Jawzî (m. 597 h.), Sharaf e-Dîn el Maqdisî (m. 611 h.), etc.


Secundo : certains font des efforts d’interprétation dans les questions rationnelles, bien qu’ils commettent des erreurs, comme n’importe qui d’autre. Ils associent leur voix aux jahmites dans certains fondements erronés. Or, contrairement à la catégorie précédente, ils n’ont pas le bagage scientifique suffisant pour les éclairer ; ils n’ont pas une grande connaissance des opinions des anciens et des grandes références traditionalistes sur ces points. Cela ne les empêche pas de connaitre de nombreux recueils de hadith par cœur (sans les chaines narratives), comme Bukhârî et Muslim.


Dans cette catégorie, nous avons ibn Hazm (m. 456 h.), Abû el Walîd el Bâjî (m. 474 h.), el Qâdhî Abû Bakr ibn el ‘Arabî (m. 543 h.) et tant d’autres. leurs ancêtres (qui avaient le même profil) étaient Bishr el Mirrîsî (m. 218 h.), Mohammed ibn Shujâ’ e-Thaljî (m. 266 h.), etc.


Tercio : certains ont connaissance des hadîth et des annales des anciens ; ils encensent la voie des prédécesseurs, bien qu’ils associent également leur voix aux mutakallimîn et aux jahmites dans certains fondements erronés. Ils ne sont pas aussi versés dans la science religieuse (Coran, sunna, annales des anciens) que les grandes références traditionalistes que ce soit au niveau technique (riwâya : analyse de l’authenticité des textes) qu’au niveau de la compréhension des textes (dirâya). Ils donnent crédit à certains principes mis en avant par les négateurs jahmites, et pensent qu’ils vont en contradiction avec les textes.


Dans cette catégorie, nous avons Abû Bakr ibn Fawrk (m. 406 h.), el Qâdhî Abî Ya’lâ (m. 458 h.), ibn ‘Aqîl (m. 513 h.), etc. Trois tendances se dégagent à l’intérieur de cette catégorie pour pallier aux textes, qui, du moins en apparence, semblent contradictoires, ne serait-ce que de leur point de vue (mushkil el hadîth) : il y a ceux qui ont recours au ta-wîl (l’interprétation figurée des textes), à l’instar d’ibn Fawrk ; ceux qui préfèrent laisser les textes comme ils sont sans chercher à les comprendre ; c’est le fameux tafwîdh prôné par el Qâdhî Abî Ya’lâ ; et enfin ceux qui jonglent entre le ta-wîl et le tafwîdh à l’exemple d’ibn ‘Aqîl.


Le problème, c’est qu’ils ne sont pas spécialistes en hadîth ; c’est ce qui les pousse à, sans s’en rendre compte, conjuguer entre les textes, avec des textes douteux, voire purement inventés. Leur faible dirâya des textes n’arrange pas les choses quand il s’agit d’expliquer certains termes, comme la « vision » d’Allah (ils ne font pas la différence entre la vision en rêve et la vision réelle, et s’appuient sur des textes faibles dans leur argumentation).[9]
4- Les traditionnistes comme ibn Hajar jonglent entre la première et la deuxième catégorie (même si en réalité, il est plus proche de la première que de la seconde, wa Allah a’lam) ; il a des points communs avec ibn Hazm qui était un jahmî, comme le souligne ibn ‘Abd el Hâdî, dans le domaine des Noms et des Attributs divins, non dans celui de la foi. Sheïkh el Islâm nous en fait l’éloge en disant qu’il était conforme au traditionalisme dans le domaine du destin et de l’irja.[10] Ibn Hajar était ce que les savants appellent un mudhabdhib, dans le domaine des Noms et des Attributs divins. Il n’était pas versé dans le kalâm et il avait pour référence première le Coran et la sunna même s’il était affilié aux ash’arites (min el ashâ’irâ el muhaddithîn lâ el mutakallimîn) ; d’où ses incohérences, et son grand penchant vers le crédo traditionaliste…


À suivre…



[1] Voir : juhûd el Imâm el Albânî fî bayân ‘aqîda e-salaf (p. 104-105) qui à l’origine est une thèse universitaire ès Magistère d’Ahmed el Jabbûrî.

[2] Rapporté par Abû Dawûd, Sheïkh el Albânî l’a considéré bon.



[3] Voir : sharh kitâb el îmân li Abî ‘Ubaïd ibn e-Sallâm.

[4] Majmû’ el fatâwa (7/195) ; Voir : ârâ el murjiya fî musannafât Sheïkh el Islâm qui est une thèse ès Doctorat du D. ‘Abd Allah ibn Mohammed e-Sanad.
Ibn Taïmiya explique à ce sujet : « Il devient clair que les bonnes œuvres extérieures ne sont pas le fruit ni les effets de la foi intérieure, si ce n’est que dans la mesure où elle les impose ou les réclame. Dès lors, il y a une interdépendance entre les deux et une relation de cause à effet. Si on fournit moins d’actes extérieurs, c’est en raison d’une foi faible. Il est donc inimaginable qu’en ayant une foi parfaite imposée (kamâl el îmân el wâjib) dans le cœur, on ne fournisse aucun acte extérieur imposé. En fournissant l’un parfaitement (kâmilan) on fournit obligatoirement l’autre parfaitement. De la même façon qu’en fournissant l’un faiblement (naqs), on fournit l’autre faiblement.
Imaginer une fois parfaite (tamm), dans le cœur sans fournir de parole ou d’acte extérieur, c’est comme imaginer une interdépendance parfaite avec l’un des deux éléments manquants, ou une cause parfaite sans effet. » Sharh hadîth Jibrîl (p. 492).

[5] Voir : jawâb el îmân wa nawâqidhuhu de Sheïkh ‘Abd e-Rahmân el Barrâk. S’agirait-il d’el ‘Aïnî (m. 855 h.) ? L’auteur des paroles : « La foi, dans le vocabulaire du Législateur peut renvoyer à son essence, quand elle n’est pas associée aux actes, comme dans le hadîth : « La foi est de croire en Allah, à Ses anges, à Sa rencontre, et à Ses messagers… »
Elle peut renvoyer également à la foi parfaite quand elle est associée aux actes, comme dans le hadîth : « Savez-vous quelle est la foi en Dieu l’Unique… C’est de témoigner qu’il n’y a d’autre dieu digne d’être adoré en dehors d’Allah, et que Mohammed est le Messager d’Allah, d’accomplir la prière, de verser l’aumône… »
La foi qui immunise d’entrer en Enfer est de la seconde sorte à l’unanimité des musulmans, et celle qui immunise d’y éterniser relève de la première à l’unanimité des traditionalistes, contrairement aux mu’tazilites et aux kharijites… Ainsi, les anciens avec Shâfi’î à leur tête, octroient aux actes le statut de piliers selon la seconde conception, non la première. Ils considèrent que la foi demeure, malgré la défection des actes, en faisant allusion à sa première conception. Autrement dit, elle est à même de sauver de l’Enfer, étant donné qu’elle existe, bien qu’elle ne soit pas accompagnée des actes. » ‘Umda el qârî (1/175).

[6] Muallafât e-Sheïkh Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb (p. 262).

[7] E-durar e-saniya (12/7,8).

[8] Voir : manhaj el el Hâfizh ibn Hajar el ‘Asqalânî fi el ‘aqîda de Mohammed Ishâq Kindû.

[9] Darr e-ta’ârudh (7/32-37).

[10] Majmû el fatâwa (4/18-19).

ÑÏ ãÚ ÇÞÊÈÇÓ