ÇáãæÖæÚ: Abâ Btîn
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  #8  
ÞÏíã 27 Dec 2014, 01:57 PM
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Ibn Bâbtîn
(Partie 6)


Nous avons vu qu’ibn Jarjîs et ibn Mansûr s’appuyaient sur le discours d’ibn Taïmiya et d’ibn el Qaïyim pour défendre leur opinion. ‘Abd e-Latîf ibn ‘Abd e-Rahmân met en lumière les véritables intentions des deux Imams sur la question : « Le discours des deux Sheïkh est suffisamment clair dans tous les passages en question. Ces derniers ne kaffar pas les auteurs de certaines paroles ou de certains actes, étant donné que la chose n’est pas facile à détecter pour ces gens-là, et qu’ils n’ont pas reçu la hujja. Ainsi, ils s’abstiennent de condamner certains fautifs au châtiment avant l’étape de l’iqâma el hujja. Ils parlent de questions bien précises et sur lesquelles il existe une divergence entre les savants de la communauté.


Quant à l’invocation et l’appel au secours des morts, en s’orientant vers eux lors des moments difficiles, tout le monde s’accorde à dire que c’est interdit et que cela relève de la grande association. Nous avons vu précédemment que le Sheïkh condamne à la peine de mort quiconque refuse de s’en repentir… »[1]


Le problème, c’est que Dâwûd ibn Jarjîs ne pénètre pas ces nuances. Il attribue à ibn Taïmiya et à son élève un discours erroné. Il s’imagine qu’ils ne condamnent pas ces pratiques païennes. Pire, il s’imagine que l’erreur dans ces domaines rapporte une récompense dans l’absolu à celui qui n’en a pas connaissance. Or, il incombe de distinguer entre l’acte auquel le Législateur donne le statut d’« association », de « mécréance » ou de « perversité » et la personne. Le fait qu’une personne peut être excusable, cela ne rend en aucun cas son acte louable. Il y a une différence entre le statut d’un acte et le statut de son auteur.[2]


L’Imam Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb lui reproche cette tendance. Il souligne que les textes d’ibn Taïmiya qu’il utilise ne vont absolument pas dans le sens qu’il lui donne.[3]


En outre, d’ibn Taïmiya lui-même considère que le ta-wîl est une restriction au takfîr dans maints passages de ses ouvrages, dont : « Celui qui fait une mauvaise interprétation des textes, mais dont les intentions sont de suivre scrupuleusement le Messager (r), il ne devient pas mécréant ni pervers, s’il se trompe à la suite d’un effort d’interprétation. Ce principe est notoire pour les questions pratiques (furû’ ndt.). Quant aux questions liées au dogme (usûl ndt.), bon nombre de gens ne donnent pas d’excuse à celui qui se trompe dans ce domaine. Or, cette tendance n’est connue par aucun Compagnon ni par leurs fidèles successeurs ni par les grandes références de l’Islam. Elle prend son origine chez les innovateurs qui innovent des principes et qui sortent de l’islam tous ceux qui ne veulent pas s’y soumettre, à l’image des kharijites, des mu’atazilites, et des jahmites. Bon nombre d’adeptes des quatre écoles l’ont adoptée, comme certains malikites, certains shafi’ites, certaines hanbalites, et d’autres. »[4]


Il dit également : « Les erreurs de ceux qui font un effort d’interprétation dans les deux domaines el khabariya (ou furû’ ndt.) et el ‘almiya (ou usûl ndt.) sont pardonnées. »[5]


Autre explication possible


Il est possible d’expliquer d’une autre façon le passage précédent d’Abâ Btîn. Il convient en effet de préciser qu’il faut distinguer entre les questions évidentes, qui ne sont pas propres rappelons-le au shirk akbar, et les questions subtiles de la religion. Il est vrai que pour les premières, l’erreur d’interprétation et l’ignorance ne sont pas une excuse. Non en elles-mêmes, mais parce qu’il est inconcevable de se tromper dans un domaine où les choses sont aussi claires, contrairement aux questions subtiles dans lesquelles même de grands savants commettent des erreurs.[6] Concernant, les erreurs d’interprétation pour les questions subtiles de la religion, l’Imam Shâfi’î ramène un consensus à son époque disant qu’elles sont excusables.[7] Même discours chez ibn Hazam,[8] ibn Taïmiya,[9] et ibn Hajar el ‘Asqalânî.[10] Certains savants comme Sheïkh el ‘Uthaïmîn, entrent plus dans les détails. Ils font une autre distinction pour le ta-wîl excusable entre le ta-wîl musawwa’, dans le sens où il a une origine dans la langue arabe, même si la conclusion est fausse et le ta-wîl ghaïr musawwa’ qui n’a aucune origine dans la langue arabe.[11]


Bref, Abâ Btîn fait allusion aux questions évidentes dont fait partie le shirk akbar. Mais, me direz-vous, qu’est-ce qui nous fait dire cela ? Nous disons, le contexte et surtout la suite du passage que l’adversaire utilise et dans lequel l’auteur voit le ‘udhr bi el jahl dans les questions subtiles de la religion. Ensuite, il nous fait comprendre que ce discours est relatif, car en reprenant le passage d’ibn Taïmiya qui ne donne pas de circonstance atténuante à certaines catégories d’individus, il nous en dévoile la raison. Autrement dit, car les erreurs en questions touchent aux questions évidentes de la religion. De plus, le discours d’ibn Taïmiya relativise, car il parle en fait de Râzî, en voulant dire que les gens de son acabit n’ont pas le droit à l’erreur sur des choses aussi claires. Ce qui n’est pas le cas des muqallid ignorant. On voit bien que ce discours est relatif comme nous le disons depuis le début.


Par ailleurs, en s’arrêtant sur le consensus revendiqué par Abâ Btîn, nous verrons que d’autres savants comme l’Imam el Qarrâfî el Mâliki,[12] et Mohammed Rashîd Ridhâ[13] font le même constat. En sachant que le dernier cité fait exception au nouveau converti et au bédouin qui habite loin des villes, ce qui rejoint notre discours.


Or, pour être plus précis, il faudrait dire que cette opinion est celle de la majorité des savants, comme le rapporte l’Imam hanafite Sadr e-Dîn el Qûnawî et ‘Alî el Qârî.[14]


En outre, dans un autre passage, l’Imâm Abâ Btin nous fait part du fond de sa pensée, en expliquant qu’en donnant des excuses à un ignorant dans les questions claires, cela implique de confiner le kufr dans le juhûd,[15] ce qui n’est pas tout à fait vrai, comme nous l’avons déjà expliqué. Lui-même nuance la chose dans certains passages de son œuvre où, certes, il démentait les paroles d’Ibrahim ibn ‘Ajlân qu’il attribuait à ibn Taïmiya et ibn el Qaïyim sur le ‘udhr bi el jahl, car à ses yeux, ce serait confiné le kurf dans le… ‘inâd.[16] Néanmoins, il a également d’autres paroles qui n’ont pas moins d’autorité que celles-ci. Qu’on en juge : « Ses paroles – qu’Allah lui fasse miséricorde –[17], disant qu’il n’est pas possible de les taxer d’apostats (kaffar), pas avant de leur avoir exposé les enseignements du Messager (r), ou en d’autres termes, qu’il n’est pas possible de les kaffar en personne, ou en particulier, en affirmant par exemple qu’un tel est un kâfir ou toute autre formule du genre. Cependant, nous disons que tel acte relève de la mécréance et que l’auteur de cet acte est mécréant. Il a donc jugé dans l’absolu que l’auteur d’un tel acte est un kâfir un nombre de fois incalculable dans ses ouvrages. Il a même relevé le consensus disant que l’auteur de ces pratiques païennes est un apostat… »[18]


Trois hypothèses sont possibles pour résoudre ce mystère : soit, l’Imam réfute ceux qui refusent dans l’absolu de kaffar l’ignorant dans le domaine du tawhîd, même celui qui vit en terre musulmane et qui a les possibilités de le connaitre, alors qu’ibn Taïmiya et son élève, précise que l’excuse est accordée au nouveau converti, ou au bédouin qui vit loin des villes, certes, mais pas à tout le monde. J’espère que l’adverse conçoit la nuance ; soit, un peu comme l’adversaire, toute proportion gardée, ibn Battîn pénétrait mal la tendance des deux Imams sur ce point précis ; soit, il est tout simplement revenu sur sa première tendance. Quoi qu’il en soit, la tendance des deux Imams est claire sur ce point, comme nous l’avons expliqué ailleurs.[19]


Ainsi, en regroupant les paroles des uns et des autres, on arrive mieux à pénétrer leurs intentions de leurs auteurs, ou tout au moins, à conjuguer entre elles.


Concernant le passage : « Sans compter que les partisans de cette tendance sont obligés d’aller à l’encontre de leur propre principe. Sinon, nul doute qu’ils deviennent eux-mêmes des mécréants. C’est du même ordre que de s’abstenir de kaffar celui qui doute de la mission de Mohammed (r). »


Midhat el Farrâj lui-même relativise merveilleusement ce discours dans un autre de ses ouvrages.[20]


À suivre…





[1] Voir : minhâj e-ta-sîs (p. 265).

[2] Idem.

[3] kashf e-shubhataïn (p. 80-81).

[4] Voir : minhâj e-sunna (5/240).

[5] majmû’ el fatâwa (20/33).

[6] ‘âridh el jahl (p. 51).

[7] El umm (6/205).

[8] El fisal (6/205).

[9] Majmû’ el fatâwa (5/563), et manhaj e-sunna (5/239).

[10] Fath el Bârî (12/304).

[11] Majmû’ e-thamîn (2/63).

[12] Sharh tanqîh el fusûl (p. 439).

[13] Hâshiya e-rasâil e-najdiya (4/517).

[14] Voir : ‘âridh el jahl (p. 571-583).

[15] E-durar e-saniya (10/400).

[16] Voir : risâla fî bayân e-shirk wa ‘adam i’dhâr jâhilihi (p. 30).

[17] En parlant des paroles d’ibn Taïmiya dans son radd ‘ala el bakrî (p. 376) auxquelles l’adversaire n’a jamais répondu.

[18] Voir : el intisâr li hizb el muwahhidîn (p. 29) ; il est compilé dans majmû’a ‘aqîda el muwahhidîn.

[19] nawâqid el îmân el i’tiqâdiya du D. Mohammed ibn ‘Abd Allah ibn ‘Alî el Wuhaïbî (1/282-283).

[20] Voir : fath el ‘Alî el Hamîd fî sharh kitab mufîd el mustafîd (p. 110-119 et 249-267).

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