ÇáãæÖæÚ: Jahm ibn Safwân
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ÞÏíã 13 May 2013, 05:14 PM
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Jahm ibn Safwân

(Partie 2)

L’imam Ahmed en parlant des innovateurs : « Ils utilisent un vocabulaire ambigu afin d’induire en erreur les ignorants avec leurs arguments fallacieux. » [E-radd ‘alâ el jahmiya wa e-zanâdiqa de l’Imâm Ahmed (p. 85).]

L’influence chamaniste

Un jour, Jahm eut un débat avec des chamanistes (probablement des Indiens qui venaient du Khurasân), ce qui laissa en lui, des traces indélébiles, à tel point qu’il cessa de prier quarante jours durant lesquels il fut envahi par un scepticisme étouffant. Il doutait de l’existence de Dieu, mais se reprit avec, malgré tout, des séquelles.[1] Il renia l’élévation d’Allah, la vision, et adhéra au panthéisme qui confond Dieu et la matière.

Les chamanes croient à la prééternité de l’Univers, à la manière des agnostiques, à la réincarnation, et ils renient la résurrection. Certains savants les font ressembler aux mazdéens, peut-être à cause de ce dernier point.[2] Pour eux, la connaissance et même l’existence, incarne tout ce qui est à la portée des cinq sens.

L’Imam Ahmed nous relate des passages de ce débat entre Jahm, qui était pourtant un grand polémiste, et ces païens qui lui proposèrent la chose suivante : « Nous te proposons un marché, laisse-nous parler avec toi, et si nous prenons le dessus sur toi, alors tu devras intégrer notre religion, et si c’est le contraire, alors c’est nous qui entrerons dans la tienne. »

Il accepta le marché, et ses vis-à-vis prirent la parole pour lui lancer notamment : « Tu prétends avoir un Dieu, n’est-ce pas ?

Oui !

Est-ce que tu l’as vu ?
Non !
Est-ce que tu as entendu sa parole ?
Non !
Est-ce que tu l’as senti ?
Non !
Est-ce que tu l’as touché ?
Non !
Est-ce que tu l’as goûté ?
Non !
Comment sais-tu alors qu’il est un dieu ? »

Jahm fut pris par un grand désarroi, et demanda un temps de réflexion pendant lequel il s’isola chez lui et arrêta complètement la prière sous prétexte qu’il ne pouvait pas adorer un dieu dont il ignorait tout de lui.

Tout polémiste qu’il était, il revint à la charge avec en main un argument qu’il avait concocté sur le modèle des chrétiens trinitaires. Ces derniers prétendent que l’âme insufflée à Jésus est issue de Dieu en personne. Ils comparent la chose à un morceau de tissu emprunté à un vêtement. Dieu serait entré dans le corps de son fils et aurait parlé à sa place. Il serait donc un esprit invisible.

Content de sa réponse, il retourna les voir pour leur fustiger : « Vous prétendez qu’une âme anime vos corps, n’est-ce pas ?

Oui !
L’avez-vous vu ?
Non !
Avez-vous entendu ses paroles ?
Non !
L’avez-vous touché ?
Non !
C’est la même chose pour Allah le Tout-Puissant ! On ne peut le voir ni sur terre ni dans l’au-delà, il est partout (et selon une version : on ne le voit pas, on ne l’entend pas, on ne le sent pas, et il est invisible à la vue), soit indistinctement dans tous les endroits. »

Certaines versions rapportent qu’il leur lança également : « Il est comme l’air, lié à toute chose, partout, soit indistinctement dans toute chose. »[3]

Il s’inspira dans son raisonnement de trois Versets : [Rien ne Lui ressemble][4] ; [Il est Allah dans les cieux et sur la terre][5] ; [Rien ne peut le cerner du regard, alors que Lui, cerne tout du regard].[6]

L’Imam Ahmed conclut ensuite : « Il fonda son discours à partir de ces trois Versets, et institua la religion jahmite. Il démentait les propos du Message d’Allah (r), et interpréta à sa façon le Livre d’Allah. Des gens parmi les adeptes d’Abû Hanifa et de ‘Amr ibn ‘Ubaïd à Bassora le suivirent, et en égara un grand nombre … »[7]

En commentaire à ce débat, ibn Taïmiya souligne que Jahm reprit point par point l’argumentation des philosophes sabéens péripatéticiens.[8]

Son niveau de science

Plusieurs de ses contemporains témoignent qu’il ne s’était jamais assis à une assemblée des savants, et n’avait aucune culture religieuse. Il était cependant doué d’une éloquence et d’une témérité qui lui permettaient de pallier ses carences.[9] Il ne rapporta jamais la moindre narration,[10] et fut enclin au kalâm qu’il promulgua autour de lui.[11] Polémiste acharné, et malgré son ignorance notoire, il composa un ouvrage en réfutation à Muqâtil ibn Sulaïmân. Nous avons vu qu’il fréquentait la même mosquée que lui et qu’il débattait avec lui lors de son séjour à Balkh. Selon ibn ‘Asâkir, Muqâtil faisait le conteur à la grande mosquée de Murû, et eut Jahm dans son auditoire. La rencontre entre les deux hommes fut électrique et ils s’invectivèrent par livres interposés.[12]

D’autres références parlent d’un livre sur les Attributs divins ; il est même possible que ce soit le précédent.[13] Il était également très actif dans la propagande de ses idées et envoyait un peu partout des courriers qu’il faisait partir du Khurasân.[14] Ceux-ci eurent leur effet et firent même des émules à l’Est de l’Empire. Ce genre de lettres ayant l’empreinte du jahmisme, se multipliait un peu partout. Même l’Imâm Ahmed eut droit à la sienne provenant d’un dénommé el Maghâzilî.[15]

Pour l’anecdote, selon Ishâq ibn ‘Îsâ el Bazzâr : « Un homme de Sûr nous rendit visite, un adepte du kalâm connu sous le nom de Sûrî. Son apparence nous plut, et son élégance nous faisait penser à un moine… Il nous disait des paroles du genre : la foi est créée, l’aumône est créée, le pèlerinage est créé, etc.

Nous ne savions pas comment lui répondre, alors nous nous rendîmes chez ‘Abd el Wahhâb el Warrâq et lui racontâmes l’évènement, mais nous eûmes pour toute réponse : « Je ne sais pas de quoi il parle, mais rendons-nous plutôt chez Abû ‘Abd Allah Ahmed ibn Hanbal, le grand érudit en la matière. »

Nous nous exécutions et, une fois chez Abû ‘Abd Allah, nous lui racontions la même chose qu’à ‘Abd el Wahhâb, et la réponse ne se fit pas attendre : « Ces questions, qui s’élèvent au nombre de soixante-dix, viennent de Jahm ibn Safwân. Rentrez chez vous et chassez-en cet homme. » »[16]

Ses « fastes »

Il était doué d’une grande éloquence et intelligence qu’il mettait au profit de ses idées ténébreuses.[17] Il mit son épouse, Zahra, et son fils Mohammed au service de sa propagande sur le caractère créé du Coran, et, ils firent, malheureusement beaucoup de dégâts. Ibn Jahm était employé chez el Ma-mûn, le Khalife abbasside de l’époque.

La plupart des livres d’Histoire soulignent que Jahm incorpora les rangs du rebelle el Hârith ibn Suraïj venu à Turmudh pour recruter des volontaires en 117 h.[18] C’est probablement à cette époque où Jahm prit les armes contre le Sultan en place, Nasr ibn Sayyâr.[19] Il joua même un rôle important dans cette insurrection, étant donné qu’il offrit sa plume au chef insoumis qui le prit comme scribe, et héraut de la révolte.[20]

À suivre…





[1] E-sunna d’el Khallâl (5/83, 87).

[2] Voir : e-tis’îniya d’ibn Taïmiya (1/240).

[3] Sharh usûl el i’tiqâd de Lâlakâî (3/424).

[4] La concertation ; 11

[5] Le bétail ; 3

[6] Le bétail ; 103

[7] E-rad ‘alâ el jahmiya wa e-zanâdiqa (p. 102-104).

[8] E-tis’îniya d’ibn Taïmiya (1/247).

[9] E-tis’îniya d’ibn Taïmiya (1/240).

[10] Mîzân el i’tidâl de Dhahabî (1/426).

[11] Sharh usûl el i’tiqâd de Lâlakâî (3/424).

[12] Voir : târîkh Dimashq (60/120).

[13] El ghuniya de Jîlânî (p. 118).

[14] E-sunna d’Abd Allah ibn Ahmed (1/183).

[15] E-sunna d’el Khallâl (5/145).

[16] E-sunna d’el Khallâl (5/93).

[17] Sharh usûl el i’tiqâd de Lâlakâî (3/424).

[18] Târîkh e-Tabarî (7/106).

[19] El farq baïna el firaq d’el Baghdâdî (p. 195).

[20] El fisal d’ibn Hazm (5/73).


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