ÇáãæÖæÚ: Le kharijisme
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ÞÏíã 19 Oct 2014, 07:12 PM
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Le kharijisme
(Partie 5)


Le critère pour définir un kharijite


Abû el Hasan el Ash’arî établit : « Les kharijites sont unanimes à « excommunier » ‘Alî ibn Abî Tâlib (t) pour s’être tourné vers le jugement des hommes. Ils divergent toutefois sur la question de savoir si son apostasie porte sur l’association ou non. Quoi qu’il en soit, ils sont unanimes à dire que tout grand péché est un acte de mécréance à l’exception des najdât qui n’adhèrent pas à cette opinion. »[1] Selon certains grands hérésiographes, les kharijites excluent de la religion à l’unanimité ‘Alî, ‘Uthmân, tous ceux qui ont participé à la bataille du Chameau, les deux arbitres entre les armées d‘Alî et de Mu’âwiya, tous ceux qui consentent à cet arbitrage, et qui donnent raison à ces auteurs ou à l’un des deux. ils assument par ailleurs qu’il est tout à fait légitime de s’insurger contre les autorités en place.[2]


Certains émettent la condition pour devenir kharijite de kaffar les Compagnons, ce qui en soit n’est pas propre aux kharijites ; nous avons vu que les râfidhîtes notamment les rejoignent en tout ou en partie sur ce point.[3] Sans compter que cela reviendrait à confiner les kharijites dans les derniers bastions ibadhites qui sont dispersés à traves le monde (Algérie, Tunisie, Lybie, Oman, etc.).


Sheïkh el Fawzân est plus précis : « quiconque adhère, et appelle à la pensée kharijite qu’il est possible de résumer en trois points, compte parmi eux :
Primo : sortir de la religion les musulmans qui commettent des grands péchés en dehors de l’association est propre à la tendance kharijite.
Secundo : se rebeller contre les autorités musulmanes en place et trahir le pacte d’obéissance qui les lie à ces dernières.
Tercio : s’autoriser moralement (istihlâl) le sang des musulmans, comme l’informe le Prophète (r) : « Ils tuent les adeptes de l’Islam et épargnent les païens. »[4]


Or, la chose est peut-être un peu plus complexe, et il incombe de nuancer quelque peu en proposant un critère beaucoup plus cohérent, soit :


Un kharijite est toute personne qui s’arroge le droit de faire le takfîr non fondé des musulmans, et qui, à la suite de quoi, se rebelle contre les autorités en place, et verse impunément le sang des musulmans.[5]




Explication


« le takfîr non fondé » : nous enseigne deux choses :
La première : il est plus vaste que le takfîr des péchés, étant donné qu’Alî et Muwâya avaient cherché une solution pacifique au conflit, ce qui en soi est louable (toléré, voire recommandé par la religion, et même obligatoire s’il s’agit de préserver la vie des musulmans). Pourtant, cela ne les empêcha pas de subir la vindicte des premiers kharijites.
La seconde : il englobe tout ceux qui kaffar les gens ne serait-ce que pour une seule chose. Il est connu que la plupart des kharijites font sortir de l’Islam les auteurs des grands péchés (le takfîr bi el kabîra). C’est pourquoi, et cela est d’une importance essentielle, il est faux de dire que la condition pour être un kharijite, c’est de kaffar bi el kabîra.


En voici la preuve :


1- Les premiers kharijites n’ont pas fait le takfîr bi el kabîra (adultère, boisson enivrante, etc.), mais en raison du tahkim qui déboucha sur la réconciliation des musulmans.[6]


Ce sont les kharijites ultra (ghulât) qui ont innové le takfîr bi el kabîra. Abû Bakr ibn el ‘Arabî distingue deux sortes :
  • Ceux qui kaffar ‘Uthmân, ‘Alî, et tous ceux qui ont participé à la bataille du chameau.
  • Ceux qui vouent à l’Enfer éternel les adeptes de la communauté mohammadienne pour les péchés qu’ils ont commis.[7]


Sheïkh ‘Abd e-Latîf ibn ‘Abd e-Rahmân entre un peu plus dans les détails en disant : « Voici en résumé leur histoire. Vous connaissez désormais leurs arguments ambigus qui les leur donnèrent la certitude que ‘Alî, Mu’âwiya et les fidèles des deux côtés sont des mécréants. Après l’événement, leur tendance se dispersa avec les fuyards qui restèrent en vie. Les ghulât parmi eux se mirent à sortir les musulmans de la religion à cause des péchés (takfîr bi e-dhunûb). Puis, ils réussirent à se réorganiser et fondèrent un État. El Muhallib ibn Abî Sufra se chargea de les combattre ; el Hujjâj ibn Yûsaf prit ensuite la relève, mais avant cela, ibn e-Zubaïr les passa au fil de l’épée à l’époque de son frère ‘Abd Allah. Ils furent connus par la suite pour le takfîr bi e-dhunûb, c’est-à-dire tous les péchés en dehors de l’association. »[8]


Ibn Hajar y va de son explication : « Les kharijites sont ceux qui reprochèrent à ‘Alî le tahkîm, qui se désolidarisèrent de lui et qu’ils combattirent, mais aussi de ‘Uthmân et de sa descendance. Ce sont les Les ghulât parmi eux qi ajoutent à cela leur takfîr. »[9]


2- Tous les hadîth qui décrivent les kharijites ne font nullement cette restriction du takfîr bi el kabîra. Une chose est sûre, c’est qu’ils se caractérisent pour dénigrer les émirs et les savants, interpréter le Coran à leur façon, faire le takfîr non fondé des musulmans, à la suite de quoi, de se rebeller contre les autorités en place, et de verser impunément le sang des musulmans, et de violer leur honneur et leurs biens. Ainsi, une menace terrible plane sur ceux qui les imitent.[10] Shâtibî va plus loin en reprochant qu’on accole les hadîth sur les kharijites à un groupe en particulier, alors que les savants les utilisent pour condamner tous les innovateurs sans exception.[11]


3- Nous avons vu avec la citation d’Abû el Hasan el Ash’arî que les kharijites ne sont pas unanimes à sortir de la religion les auteurs des grands péchés. Les najdâtes en effet n’adhèrent pas à ce principe, ce qui conforte d’autant plus la thèse que nous soutenons.


L’interdiction de sortir contre un gouverneur pervers à l’unanimité des savants


En regard des hadîth précédemment cités sur le sujet et tant d’autres, les savants en ont conclu qu’il est strictement interdit de prendre les armes contre un gouverneur tyran, tant qu’il reste musulman. La seule condition pour le faire, c’est, comme l’indiquent les textes, qu’il soit l’auteur d’une mécréance qui ne fait aucun doute et qui est claire comme l’eau de roche. C’est question est tellement importante que les traditionalistes, appelés de nos jours par ses opposants pseudo salafis, ou de façon beaucoup moins reluisante « talafi », en ont fait un point central de leur prédication, et un signe distinctif des partisans de la vérité, étant donné que la majorité des innovateurs, avec à leur tête les kharijites, le leur contestent. Cette question est tellement importante que pratiquement tous les recueils de ‘aqîda étalent ce crédo.


Ibn Battâl est l’un des légistes qui rapportent ce consensus.[12] E-Nawawî va plus loin en pointant un doigt accusateur contre les partisans de son école, mais aussi contre les mu’tazilites qui dérogent ce consensus. Puis, il conclut avec une parole d’el Qâdhî dont voici les termes : « Il est dit que si divergence il y a eu, c’était au début, mais, avec le temps, un consensus se dégagea sur l’interdiction de se rebeller. »[13]


Ibn Taïmiya établit : « L’élite des musulmans interdisait de se rebeller et de prendre les armes en période de troubles. ‘Abd Allah ibn ‘Omar, Sa’îd ibn el Musaïb, ‘Alî ibn el Husaïn, etc. défendaient de sortir contre Yazîd, l’année d’el Harra. El Hasan el Basrî, Mujâhid, et tant d’autres défendaient de participer à la campagne (fitna) d’ibn el Ash’ath. Par la suite, un crédo se dessina chez les traditionalistes qui appelaient à ranger l’épée dans son étui en période de troubles. Ils se conformaient ainsi aux hadîth authentiques imputés de façon certifiée au Prophète. Ils prirent l’habitude de l’évoquer dans leur crédo, et incitaient à la patience face à la tyrannie des sultans, et à ne pas prendre les armes contre eux. »[14]


Ailleurs, il signe : « C’est pourquoi, l’un des principes traditionalistes invite à renoncer à prendre les armes contre les sultans, et à participer à des troubles, contrairement aux mu’tazilites, qui voient en cela, l’un des grands principes de leur religion. »[15]


Même « son de cloche » chez ibn Hajar qui considère, que dans un premier temps, les anciens voyaient l’épée, mais, s’étant rendu compte des inconvénients énormes qu’une telle initiative engendrait, notamment lors des compagnes d’el Harra, et d’ibn el Ash’ath, en fin compte, ce qui allait devenir l’un de leurs principes, ils y renoncèrent définitivement.[16]


Y a-t-il exception à la règle ?


On peut toujours avancer que certains anciens prirent les armes contre les autorités en place à l’instar d’el Husaïn, des habitants de Médine qui se soulevèrent contre Yazîd, et de certains savants dont Sa’îd ibn Jubaïr, qui prêtèrent main forte à ibn el Ash’ath, etc.


Or, cet argument ne tient pas pour les raisons suivantes :


Premièrement : Les textes sont clairs sont la chose.[17]


Les traditionalistes ne font passer rien ni personne avant les textes. Je ne vais pas m’étaler sur ce principe tant celui-ci est évident, mais j’aimerais juste évoquer deux textes et deux, voire trois règles qui en découlent. Pour le premier texte, il s’agit du Verset : [Si vous avez le moindre litige, alors ramenez-le à Allah et au Messager, si vraiment vous croyez en Allah et au Jour du jugement dernier ; cela vaut mieux et aura de meilleures conséquences pour vous].[18] Voici la règle qui en découle : Ibn el Qaïyim souligne à cet effet : « S’il n’existait pas dans le Livre d’Allah et la Tradition de Son Messager des lois venant trancher entre les différents litiges, et si cela, en outre, n’était pas suffisant, il n’aurait pas été enjoint de s’y référer en cas de litige. Il est impossible qu’Allah (I) ordonne de ramener les litiges à des références non en mesure de les trancher. »[19]


Voici le second Verset et la règle qui en découle : (Voici Mon Chemin droit alors empruntez-le, et ne suivez pas les sentiers qui vous en feront dévier).[20] Ibn el Qaïyim – qu’Allah lui fasse miséricorde – fait le commentaire suivant : « Un seul chemin mène à Allah. Il correspond à la révélation et aux Livres qu’Il a descendus aux envoyés. Il n’est pas possible de parvenir à lui par un autre chemin. Si les hommes affluaient de toutes les routes et s’ils frappaient à toutes les portes, elles leur seraient toutes obstruées et fermées, à l’exception d’une seule ; celle-ci est reliée et mène directement à Allah. »[21]


Voici sur le sujet, une dernière parole extraordinaire d’ibn el Qaïyim et dont voici les termes: « Il n’incombe nullement à la nation de suivre ou de s’en remettre au jugement de quiconque inaugure un discours et établit des règles en fonction de sa propre compréhension et interprétation. Il importe avant tout d’exposer son discours aux enseignements du Messager. S’il correspond et est conforme à ceux-ci, on peut dans ces conditions témoigner de sa véracité et l’approuver. Sinon, il est impératif de le réfuter et de le rejeter. Dans le cas où on ne peut ni y distinguer la conformité ni la non-conformité, il faudra le laisser en suspens. Quand bien même il serait légitimé de s’en servir comme loi ou comme fatwa, il le serait tout autant de le mettre de côté. »[22]


À suivre…


Par : Karim Zentici
http://mizab.over-blog.com/



[1] Maqâlât el Islâmiyîn (1/167).

[2] Voir : el farq baïna el firaq (p. 73), e-tabsîr fî e-dîn d’el Isfarânî (p. 45).

[3] Voir : el khawârij (p. 51) de Sulaïmân el Ghusn.

[4] Rapporté par el Bukhârî (3344) et Muslim (1064), selon Abû Sa’îd (t).

[5] Haqîqa el khawârij (p. 34-38) de Faïsal el Jâsim

[6] Voir : ‘âridh el ahwadhî (9/38) d’Abû Bakr ibn el ‘Arabî

[7] Idem.

[8] E-durar e-saniya (9/229).

[9] Hadî e-sârî (p. 483).

[10] El i’tisâm de Shâtibî (2/726).

[11] Idem.

[12] Sharh el Bukhârî d’ibn Battâl (10/8).

[13] Sharh Muslim (12/469).

[14] Minhâj e-sunna (12/297).

[15] Majmû’ el fatâwâ (28/503).

[16] Tahdhîb e-tahdhîb (2/288).

[17] Sharh Muslim d’el Ubaï (5/196).

[18] Les femmes ; 59

[19] I’lâm el mawqi’în (1/49).

[20] Le bétail ; 153

[21] E-tafsîr el qaïyim (14-15).

[22] Zâd el ma’âd (1/38).

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